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Manies d’été

Pourquoi envoyons-nous des cartes postales kitsch ?

Antony Chanthanakone publié le 29 juillet 2022 3 min

« Je m’la coule douce dans l’Yonne ! », « Vacances épuisantes : à midi on pointe, le soir on tire ! », etc. Nous connaissons tous ces cartes postales kitsch, typiques des présentoirs tournants installés en zones touristiques. Et nous aimons parfois les envoyer (sans enveloppe). Demandons à des philosophes très sérieux de nous dire pourquoi…

 

  • Par goût de la « connerie ». Pour le philosophe américain Harry Frankfurt, auteur du best-seller De l’art de dire des conneries, la vie ordinaire est si pesante, avec ses thèmes conflictuels comme la politique, la religion ou les idéologies, que nous avons quelquefois besoin de nous débarrasser des sujets sérieux. Selon lui, « dans une partie de déconnade, les participants font les cons, c’est-à-dire qu’ils ont tendance à adopter des positions et des attitudes variées, de façon à s’écouter eux-mêmes énoncer des idées inhabituelles et à observer la réaction des autres, sans devoir pour autant s’engager personnellement ». C’est pourquoi on ose parfois la carte postale moche, kitsch ou carrément très vulgaire – fessiers qui se dandinent, bière qui coule à flots, poitrines à l’air, animaux stupides, grimaces ridicules, calembours cochons, centrale nucléaire en majesté… chacun ses (mauvais) goûts. Selon Harry Frankfurt, il « est entendu par les déconneurs que les opinions affichées ne reflètent pas nécessairement les convictions profondes ni les sentiments des orateurs ». Les expéditeurs peuvent se « sentir encouragés à dire ce qu’ils ont sur le cœur sans craindre d’éventuelles conséquences ». C’est le cas pour un bon nombre de ces cartes potaches inoffensives, mais aussi pour celles qui affichent typiquement le sexisme le plus décomplexé et qui n’ont, malgré l’air du temps, pas encore complètement disparu des magasins de souvenir. Mais jusqu’à quand ?
  • Par mépris social. De nombreux adeptes de la carte postale « beauf » s’amusent à jouer de ce qu’ils croient être les codes culturels des classes populaires – sur le mode camping-Tour de France-apéro-pastis. Cela exprime au fond, comme le dit Pierre Bourdieu dans La Distinction (1979), un « dégoût du goût des autres », parodié et fantasmé. Selon le sociologue français, les structures sociales (et la domination) sont en effet incorporées dans nos jugements de goût et nos pratiques les plus anodines. Envoyer une carte postale « beauf » renverrait donc à une forme de violence symbolique, un autre concept cher à Bourdieu, consistant à enfermer les « classes inférieures » dans la grossièreté et la misogynie. Comme si, même en vacances, il fallait continuer de marquer son appartenance au groupe social auquel on est – ou croit être – rattaché.
  • Par goût du paradoxe et de la transgression. Les cartes postales kitsch sont souvent assorties de formules drolatiques au recto. « Provoc’ » à peu de frais, c’est aussi pour celles-ci qu’on aime les envoyer, surtout sans enveloppe, en laissant le message personnel à la vue de tout le monde. En ce sens, les cartes postales kitsch ou « beauf » représentent l’essence de ce moyen de correspondance bien particulier, telle que le comprend Jacques Derrida. Dans La Carte postale. De Socrate à Freud et au-delà (1980), le philosophe insiste sur ce point : « Ce que je préfère dans la carte postale, c’est qu’on ne sait pas ce qui est devant ou ce qui est derrière, […] recto ou verso. Ni ce qui importe le plus, l’image ou le texte, et dans le texte, le message ou la légende, ou l’adresse. » Si le texte rédigé au verso est aussi stéréotypé (« Il fait beau. Nous nous amusons bien. On vous embrasse fort ») que l’image et le texte du recto, c’est parce que la carte postale joue avec les clichés et détourne joyeusement le sérieux de la lettre cachetée. Qu’on l’aime ou non, la carte postale kitsch est un clin d’œil plus riche qu’on ne le croit !
À lire aussi : envoyait-on déjà des cartes postales dans l’Égypte antique ?
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