L’aventure d’un classique

Proudhon et les fronts de gauche

Victorine de Oliveira publié le 3 min

Lorsque Proudhon publie Qu’est-ce que la propriété ? en 1840, le socialisme, soit la volonté de collectiviser les moyens de production, est encore une affaire de penseurs plutôt que de partis politiques. En France, débats et scissions divisent partisans d’un mouvements révolutionnaire et soutiens du réformisme. Au moins trois grandes options émergent autour du marxisme, de l’anarchisme et de la structuration politique du socialisme, même si la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO), ancêtre du Parti socialiste, ne voit le jour qu’en 1905.

 

Socialisme

Jules Guesde (1845-1922)

Membre fondateur du Parti ouvrier (PO) en 1882 avec Paul Lafargue puis de la SFIO, il est de ceux qui ont œuvré à sa structuration en parti du socialisme français. Ardent défenseur du marxisme, Guesde est plutôt partisan d’un socialisme révolutionnaire qui se passe des urnes.
Cela ne l’empêche pas d’être élu député en 1893. En 1910, au cours d’un débat sur les retraites, il fait cette proposition : « Faire disparaître du projet de loi sur les retraites tous les prélèvements sur les salaires ouvriers et demander les 80 millions ainsi disparus soit au monopole des assurances par l’État, soit à des impôts spéciaux n’atteignant que les privilégiés du capitalisme industriel et terrien. » Il dénonce par ailleurs « la retraite pour les morts », dont l’âge est fixé à 65 ans – seule 8 % de la population atteint alors cet âge.

Jean Jaurès (1859-1914)

Après des études de philosophie et une thèse de métaphysique intitulée De la réalité du monde sensible (1892), le député du Tarn incarne le courant réformiste de la SFIO, qu’il codirige avec Jules Guesde. S’il soutient la grève des mineurs de Decazeville (Aveyron) en 1886, il réprouve les violences commises par les ouvriers –  la défenestration d’un ingénieur notamment. Son socialisme est à la fois intellectuel – après avoir défendu ses idées dans La Dépêche, il cofonde L’Humanité en 1904 – et militant avec le soutien à des piquets de grève. Rapidement, l’aile réformiste de la SFIO prend le dessus sur les révolutionnaires, ce qui va avec l’élaboration d’une stratégie électorale de plus en plus prioritaire. Avec son socialisme dit « humaniste », Jaurès tente de concilier marxisme et attachement aux droits de l’homme.

Expresso : les parcours interactifs
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