Proudhon : à quoi sert vraiment la pause dominicale ?
Actuellement, le risque est grand de vivre chaque jour comme un dimanche ou, au contraire, de ne pas s’accorder le moindre répit. Pourtant, bénéficier d’un jour de repos, c’est faire œuvre de salubrité publique, soutient le penseur socialiste Pierre-Joseph Proudhon dans un texte méconnu, “La Célébration du dimanche”. Nous vous invitons à en lire un extrait.
Lorsqu’on travaille chez soi, on devient son propre maître, avec toutes les libertés que cela comprend – celle de se coucher, de se lever tard – mais aussi avec un risque majeur : celui de tomber dans l’auto-exploitation, de ne pas savoir mettre le holà, de ne s’accorder aucun repos franc et massif, de continuer à consulter ses e-mails en soirée ou de rester collé sur son écran d’ordinateur tout le week-end. Et s’il était plus avisé de s’accorder une vraie pause, de cesser l’activité productive le dimanche, même quand on est confiné et que cela paraît particulièrement arbitraire ?
“Pour Proudhon, la justification profonde du dimanche n’est ni religieuse ni hédoniste : elle est sociale !”
Aux yeux du penseur socialiste Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865), qui s’opposa à Karl Marx et au rêve centralisateur du communisme pour défendre un modèle mutualiste, l’institution du dimanche fut le coup de génie de Moïse législateur. C’est, aux yeux de l’athée convaincu que fut Proudhon, le plus révolutionnaire des commandements du Décalogue : « Souviens-toi du jour du repos, pour le sanctifier. » Et cela, non pas parce que le dimanche est le jour du seigneur, des cérémonies religieuses, de la prière. Et pas non plus parce que ce serait le jour de la paresse et du plaisir. Pour Proudhon, la justification profonde du dimanche n’est ni religieuse ni hédoniste : elle est sociale ! Le dimanche est la journée qui nous permet de faire société, à la faveur d’une grève générale hebdomadaire. Pour entretenir nos liens, pour éprouver une fraternité collective, il convient que chacun quitte son usine ou son bureau, son rôle professionnel, son habit qui dénote sa fonction, et que la collectivité soit mise en contact avec elle-même, qu’elle se découvre dans une liberté retrouvée. Le travail, spécialisé, orienté vers l’utilité, a tendance à nous isoler, chacun dans son domaine de compétence. Le dimanche nous rassemble. Il est vrai que cette dimension sociale du dimanche, comme remède à la solitude, est plus difficile à ressentir lorsqu’on est confiné chez soi. Mais ne pas travailler, n’est-ce pas l’occasion d’avoir des conversations et des échanges, avec les siens ou par tout moyen de communication disponible, non pas pour produire quelque ouvrage, mais pour rien ?
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