Quelles sont “Les Idées de demain” ? Le sommaire de notre numéro spécial
Sorti en kiosque ce mercredi, notre numéro spécial « Les Idées de demain » propose une sélection des articles les plus importants et stimulants publiés par des philosophes et des essayistes dans la presse internationale sur les grands enjeux des années à venir. Le sommaire se répartit en cinq grands thèmes : la révolution de l’IA, la démocratie en crise, le champ de bataille climatique, le brouillard de guerre et la société en mutation.
Le voici en détail.
La révolution de l’IA
- « L’IA n’existe pas », affirme l’expert des technologies de réalité virtuelle Jaron Lanier dans un essai remarqué paru dans le New Yorker et traduit ici. Il nous rappelle que l’intelligence artificielle n’est pas une créature autonome mais un outil conçu dans un contexte. Il nous invite à reprendre la main en proposant le concept de « dignité numérique ».
- Dans l’article « Techno-politique de la surveillance », la géopolitologue Asma Mhalla montre comment les nouvelles techniques de surveillance transforment le champ politique, aussi bien dans les régimes autoritaires que les démocraties libérales.
- La physicienne et biologiste Sara Imari Walker assure de son côté que « l’IA, c’est de la vie ». Pour cette pionnière de la « théorie de l’assemblage », la technologie est le fruit d’un processus millénaire d’évolution qui brouille les frontières entre l’inerte et le biologique.
La démocratie en crise
- C’est un réquisitoire contre Emmanuel Macron que livre le politologue Jean-François Bayart. Atteinte aux libertés, brutalisation des institutions, maintien de l’ordre violent… Pour affirmer son autorité fragile, le président dote l’État d’un arsenal répressif qui pourrait un jour tomber dans de très mauvaises mains : « La France est bel et bien en train de rejoindre le camp des démocraties illibérales. »
- L’ordre n’est pas une valeur conservatrice, affirme avec provocation le philosophe slovène Slavoj Žižek. Alors que le monde sombre dans un mélange inquiétant d’anarchie et d’autoritarisme, les progressistes se tirent une balle dans le pied en abandonnant la question de la sécurité. Ils doivent au contraire se réapproprier la loi et l’ordre.
- Souvent utilisé pour qualifier les dérives autoritaires de certaines régimes représentatifs, la notion de « démocratie illibérale » fait florès dans les médias. Est-elle vraiment pertinente ? Pas vraiment pour le politologue Raphaël Demias-Morisset, qui revient sur l’histoire et les usages du concept pour en montrer l’insuffisance et l’incohérence.
- Malgré la décolonisation, les logiques coloniales racistes qui hiérarchisent les humains persistent et se transforment : en Europe comme en Afrique, sous différentes formes, le monde est pris dans un étau racial, analyse la philosophe Nadia Yala Kisukidi.
- Faut-il empêcher quiconque de devenir milliardaire ? Oui, défend le philosophe Julian Baggini, qui reprend l’idée de « limitarisme ». Pas besoin d’être marxiste pour juger l’extrême fortune inacceptable : les libéraux aussi ont de bonnes raisons de s’inquiéter de l’accumulation et la concentration des richesses.
Le champ de bataille climatique
- La transition écologique rime-t-elle avec l’austérité la plus morose ? Au contraire, pour l’essayiste américaine Rebecca Solnit : la sobriété et la décroissance, qui rompent avec la logique de l’accumulation compulsive des choses, ouvrent la voie à une autre abondance, faite de joie, de liens et de liberté.
- Quelque chose de nouveau a commencé à Sainte-Soline, pour le philosophe éco-léniniste suédois Andreas Malm, théoricien du sabotage vert : pour la première fois, les militants se sont attaqués aux dispositifs d’adaptation construits par le capitalisme pour résister sans rien changer au désastre qu’il a créé.
- Pourquoi les rapports du Giec semblent n’avoir aucun impact sur les politiques ? Aux yeux de la philosophe belge Isabelle Stengers, la communauté scientifique paie aujourd’hui le prix d’un pacte avec le diable : elle a renoncé à l’engagement pour garantir son indépendance. Fort heureusement, de plus en plus de chercheurs osent bifurquer et politiser leurs pratiques.
- La technique nous sauvera-t-elle de la crise écologique, comme le croient certains techno-optimistes ? Ou est-elle au contraire un danger pour la planète, comme le redoutent les techno-pessimistes ? Pierre Charbonnier et Léo Camilli déjouent cette opposition binaire et font l’éloge très philosophique d’une technologie modeste : la pompe à chaleur.
- Marx au secours de la planète ? Le philosophe japonais Kohei Saito le pense. Contre l’image d’un Marx productiviste, inutile pour la pensée écologique, Saito puise chez lui l’idée d’un communisme de la décroissance.
Le brouillard de guerre
- Dans un discours prononcé devant les Nations unies, l’historien américain Timothy Snyder dénonce la rhétorique du mensonge systématique employée par la Russie pour justifier la guerre qu’elle mène en Ukraine. La paix exige au contraire que le pays se confronte, avec lucidité, à sa propre histoire.
- De l’extérieur, le régime iranien semble avoir maté le mouvement de révolte qui s’est levé à partir de l’automne 2022. En réalité, explique l’anthropologue franco-iranienne Chowra Makaremi, l’insurrection a contribué à la création d’un sujet révolutionnaire qui ne disparaîtra pas de sitôt.
- Le 7-Octobre est le 11-Septembre israélien : un traumatisme durable, qui bouleverse la situation au Proche-Orient, analyse la sociologue franco-israélienne Eva Illouz. L’attentat du Hamas a révélé la fragilité d’un État hébreu jusqu’alors confiant dans sa supériorité militaire et technologique. La faute en incombe, d’abord, à Benyamin Netanyahou, plus occupé de saper le pouvoir judiciaire que d’assurer la sécurité du pays.
- Comment soutenir la cause palestinienne après l’attaque du 7 octobre 2023 ? En commençant par dissocier strictement cette cause du Hamas, qui est tout sauf un mouvement révolutionnaire de libération, pour l’écrivain français Joseph Andras. Les actes du Hamas défigurent l’exigence morale qui fait la dignité d’une lutte au cœur même de la violence.
La société en mutation
- On le présente parfois comme le grand rêve contemporain. Mais c’est aussi un rêve particulièrement creux : dans un essai polémique, la philosophe américaine Agnes Callard dénonce la stupidité du désir de voyage.
- Les bêtes ont-elles une idée de la mort ? C’est une évidence, pour la philosophe Susana Monso. En témoigne leurs nombreuses pratiques funéraires. Une invitation à penser, sans anthropomorphisme, le deuil animal.
- L’autodétermination face à la mort est une dimension fondamentale de la dignité. Mais, souligne la philosophe Cynthia Fleury, le respect de cette autodétermination ne doit pas nous conduire à abandonner à l’indignité les existences en situation de dépendance, comme c’est trop souvent le cas dans nos sociétés. La dignité doit devenir un bien commun.
- Véritable « mal du siècle », la dépression reste pourtant taboue. Revenant sur son propre effondrement psychique, le philosophe Julien De Sanctis explique le fonctionnement de cette maladie de l’esprit qui transforme le rapport au monde, pour mettre des mots sur un trouble omniprésent mais souvent tu.
Qu’est-ce qu’un sommaire de journal ? C’est une grille de lecture, à travers laquelle regarder le monde. Bien sûr, le monde bouge, et plus vite il change, plus rapidement la grille devient obsolète. Et puis, toutes les grilles ont l…
Certains mots de la grille se réfèrent à des articles du numéro. Solution dans le prochain numéro.
Toute l’année, la rédaction de Philosophie magazine repère dans la presse internationale les interventions les plus marquantes de philosophes et essayistes sur…
La rédaction de Philosophie magazine entretient depuis des années une relation privilégiée avec le plus amical, le plus curieux, le plus optimiste…
Spécialiste de philosophie morale et politique, Michel Terestechenko explique ici, en préface aux extraits de « Le travail, l’œuvre, l’action…
Ces conférences publiques diffusées sur Internet connaissent un immense succès. Elles font intervenir des penseurs, des entrepreneurs et autres showmen qui y rivalisent d’“idées pour changer le monde”, dans un format à mi-chemin entre…
Sommes nous libres de désirer ? Non, affirme le penseur René Girard, auquel nous avons consacré ce numéro exceptionnel. Nous désirons un objet…
L’agent britannique est immuable. Sexiste, un tantinet raciste, il incarne une certaine idée de la virilité qui rassure les fans.