Xavier Dupré de Boulois : “En Europe, le respect de l’État de droit ne saurait être soumis à des spécificités nationales”
La Hongrie et la Pologne bloquent le plan de relance économique européen de 750 milliards d’euros, parce que celui-ci serait conditionné au respect de l’« État de droit ». En effet, ces deux pays ont récemment pris des mesures de restriction des libertés qui les placent dans la ligne de mire de l’Union européenne. Mais cette notion d’« État de droit » a-t-elle le même sens partout en Europe ? Réponses avec le professeur de droit public Xavier Dupré de Boulois.
Comment, en tant que juriste, définissez-vous un État de droit ?
Xavier Dupré de Boulois : Il y a deux conceptions de l’État de droit qui cohabitent aujourd’hui dans nos cultures juridiques. La première est une conception formelle : elle repose sur l’idée que l’État est un système juridique fondé sur le respect du droit et que les autorités publiques agissent conformément à des règles qui s’imposent à elles. Cette conception ne préjuge pas de ce qu’est le contenu du droit – de sorte qu’on peut considérer qu’un État autoritaire est encore un État de droit. On parle même de la Chine comme d’une « dictature de la loi ». Mais une conception plus exigeante de l’État de droit s’est développée plus récemment : elle est dite « substantielle ». Dans ce cadre, l’État de droit implique en sus la garantie des principes démocratiques et des droits individuels fondamentaux. Aujourd’hui, en France comme en Europe, la vision partagée de l’État de droit intègre ces deux conceptions. Ce qui fait le lien entre les deux, c’est l’idée que les conditions de production et de sanction du droit doivent garantir à la fois le pluralisme et l’impartialité. La production du droit renvoie au législateur, qui est élu, ce qui suppose le pluralisme des opinions et la possibilité des oppositions de participer à la compétition électorale – bref, le respect d’un processus démocratique satisfaisant. Quant à la sanction du droit, elle consiste à garantir le respect du droit par les autorités publiques, ce qui implique la possibilité de recourir à un juge impartial et indépendant du pouvoir exécutif.
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