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© Éditions Arthaud

Le livre de Noël

“Atlas de botanique parfumée”, par Jean-Claude Ellena et Karin Doering-Froger

Ariane Nicolas publié le 22 décembre 2020 4 min

À la recherche d’un cadeau de Noël pétillant et instructif ? Voilà un beau livre tout indiqué. Sorti en octobre 2020 aux Éditions Arthaud, l’Atlas de botanique parfumée dresse le portrait d’une quarantaine de plantes utilisées dans la parfumerie, des plus connues (rose, jasmin…) aux plus étonnantes (osmanthe, ylang-ylang, benjoin…). Jean-Claude Ellena, ancien “nez” d’Hermès, s’associe à l’illustratrice Karin Doering-Froger pour nous faire découvrir les caractéristiques biologiques de ces espèces, ainsi que leur habitat, la spécificité de leurs senteurs ou encore le rôle symbolique qu’elles ont pu occuper dans leurs pays de provenance. À la fois herbier élégant et exploration subjective des senteurs que la nature a créées, cet atlas propose un voyage rafraîchissant autour du globe, qui nous rappelle combien l’odorat – trop peu évoqué par la philosophie – s’avère un sens admirable.

Illustrations © Karin Doering-Froger

Illustrations © Karin Doering-Froger

 

  • Bois, écorces, fleurs, feuilles, gommes, racines… Telles sont les principales catégories inventoriées par le “compositeur” Jean-Claude Ellena, natif de Grasse, déjà auteur de plusieurs livres sur le sujet et qui est sur le point de faire paraître un « Que-sais-je ? » sur Le Parfum (PUF, 2021). Rappelant en introduction que “l’éminent Linné s’est contenté de l’apparence des plantes, sans s’intéresser à leurs odeurs”, Jean-Claude Ellena croise les principaux savoirs botaniques associés à ces produits avec l’art de l’olfaction, qu’il pratique depuis cinquante ans. Il distille ainsi les informations essentielles à connaître sur chaque plante et les associe, quand il le juge opportun, à un parfum célèbre : on apprendra par exemple que l’emblématique odeur de l’ambre s’obtient en croisant “vanilline et labdanum” (alors que la pierre ambre ne sent rien) ou bien que les vapeurs du parfum Shalimar, créé en 1925 par Guerlain, sont notamment composées de “goudron de bouleau”. Saviez-vous par ailleurs qu’il faut près de quatre tonnes de fleurs de roses pour obtenir un kilogramme d’essence ? Et que l’odeur de certaines plantes n’a toujours pas pu être reproduite en laboratoire tandis que certaines, comme celle de l’angélique, se laissent facilement “copier” ? 
  • Au-delà de ces piquantes anecdotes, c’est une histoire culturelle de chaque plante qui se dessine. La botanique raconte en creux les grands échanges entre civilisations (tous les continents sont évoqués), la diversité des pratiques de pouvoir (par exemple, l’importance de l’encens en Chine) ainsi que des rites funéraires ou du rapport au divin. Les siècles passant, certaines plantes ont gagné en popularité tandis que d’autres ont sombré dans l’oubli. Pensons à la “mousse de chêne”, qui servait de shampooing sec au Moyen Âge : “Les extraits de lichen ont pratiquement disparu de la fabrication des parfums en raison d’un potentiel allergisant, entraînant ainsi la perte d’un savoir-faire.” Atlas oblige, la géographie est également omniprésente dans ce livre illustré. Jean-Claude Ellena s’intéresse au local (la fabrique d’extrait de narcisse à Aumont-Aubrac, en Lozère) tout comme au lointain (la production de vétiver au Mali). Si l’on a coutume d’associer la géographie à la vue, l’auteur fait justement remarquer que c’est aussi par le nez que nous prenons conscience de la profondeur du monde : “Si le paysage raconte, l’odeur annonce […] Qui pourrait dire qu’une odeur n’est pas une géographie ?”
  • La botanique et la parfumerie appellent également une écriture particulière, à la fois technique et poétique. Une des plaisirs procurés par ce livre – qui ne sent que le papier –, c’est la découverte de certains mots habituellement employés par des spécialistes : capitule, rhizome, mellifère, absolue, collet, essencier… On sent que Jean-Claude Ellena prend goût à mêler ce vocabulaire savant à une approche plus subjective des odeurs : un parfum sera tantôt “vertical”, “lascif”, “bleu”, “intelligent” ou “rond”. D’aucuns trouveront peut-être le procédé snob, mais les illustrations élégantes et généreuses d’inspiration Art nouveau contrebalancent la raideur quelque peu satisfaite des commentaires. L’auteur cite d’ailleurs Paul Valéry pour s’en expliquer : “Une perception directe est d’autant plus précieuse que nous savons moins l’exprimer. Plus elle met en défaut les ressources de notre langage, plus elle nous contraint à les développer.” (Paul Valéry, Le Bilan de l’intelligence, conférence de 1935) Surtout, une tendre nostalgie affleure ici ou là, notamment quand il est question des modes actuelles en matière de parfums : “Dans les années 30, les parfums étaient souvent construits à la hache, ce qui leur donnait du caractère, et ne cherchaient pas le consensus mou et sucré d’aujourd’hui.” Snif !
  • Il y a toujours quelque chose de réconfortant à s’entourer de plantes, même lorsqu’elles sont seulement dessinées. Picorer dans cet ouvrage procure une réelle sensation de bien-être, semblable à celle que Jean-Jacques Rousseau décrit dans sa septième Rêverie du promeneur solitaire. À propos des herbiers qu’il concocte au cours de ses promenades dans les Alpes, le philosophe écrit : “Il y a dans cette oiseuse occupation un charme qu’on ne sent que dans le plein calme des passions mais qui suffit seul alors pour rendre la vie heureuse et douce.” Rousseau regrette à ce titre que la botanique soit parfois trop attachée aux “systèmes” de classement des plantes, à la “méthode” de la collecte ou encore à la fabrication de potions pharmaceutiques. L’Atlas de botanique parfumée échappe heureusement à ces trois écueils. Enfin, le savoir-faire humain, qui transforme la nature pour mieux la sublimer, n’est jamais vu comme une fin en soi. Le livre contemple les senteurs et s’émerveille devant tant de diversité, toutes ces plantes s’enchevêtrant les unes les autres en un délicieux panorama : “La finalité n’est pas de copier la nature mais de s’ajouter à la nature, pour l’exprimer autrement, pour l’inventer.”

 

Paru en 2020 chez Arthaud, l’Atlas de botanique parfumée, de Jean-Claude Ellena avec des illustrations de Karin Doering-Froger, est disponible ici.

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