De la distension à l’attente
Le temps ? On fait grand crédit à saint Augustin d’en avoir formulé l’aporie : « Qu’est-ce que le temps ? Tant que personne ne me le demande, je le sais ; mais si je veux l’expliquer à qui me le demande, je ne le sais plus » (Confessions, XI, 14, 17). Compliment mal venu, parce qu’il dispense de comprendre la réponse qu’à la fin il apporte à la question.
Cette aporie résume en fait l’héritage de la philosophie grecque, qui conclut que « le temps n’est pas, ou alors qu’à peine et obscurément » (Aristote, Physique, IV, 10, 217 b33). Le temps, censé durer parce qu’il passe comme un quasi-mouvement que l’esprit mesurerait, en réalité ne dure pas et se défait en un non-étant : le passé n’est plus, tandis que le futur n’est pas encore, en sorte qu’il ne reste, pour être le temps, que le présent. Mais combien le présent dure-t-il ? Le présent ne dure pas le temps d’un an, ni d’un mois, ni d’un jour, ni d’une heure, ni d’une minute : chacune de ces unités abstraites se divise jusque dans l’instant. Mais ce point lui-même n’a pas d’épaisseur. Il disparaît dès qu’il apparaît, « ne s’étend même pas durant le moindre délai » ; bref, si « le présent n’a aucun espace, où donc est le temps que nous disons étendu » (XI, 15, 20) ? Le temps n’est pas dans le monde, ni dans les choses. D’où une conséquence : le temps, s’il ne se trouve jamais dans les choses, ou bien n’est absolument pas, ou il se situe ailleurs qu’en elles. Où donc ? En nous, car nous, nous le mesurons (cela Aristote l’avait bien vu). Mais comment le mesurons-nous ? En le sentant : « nous mesurons les passages du temps, lorsque nous mesurons en les sentant » (cum sentiendo metimur, XI, 16, 21). Et cela Aristote ne l’avait pas vu. Mais comment sentons-nous le passé qui n’est plus, le futur qui n’est pas encore, le présent qui ne dure pas, mais qui passe et se dépasse sans marquer le pas, jamais ?
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