Aller au contenu principal
Menu du compte de l'utilisateur
    S’abonner Boutique Newsletters Se connecter
Navigation principale
  • Le fil
  • Archives
  • En kiosque
  • Dossiers
  • Philosophes
  • Lexique
  • Citations
  • EXPRESSO
  • Agenda
  • Masterclass
  • Bac philo
 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
rechercher
Rechercher

Stanislas Roquette interprétant Les Confessions d'Augustin au Théâtre national de Chaillot © Cyril Bonnefoy

Théâtre

Les “Aveux” d'Augustin prennent corps, à Chaillot

Cédric Enjalbert publié le 05 janvier 2014 3 min
Le comédien Stanislas Roquette incarne avec brio la pensée vive déployée dans “Les Confessions” d'Augustin, au Théâtre de Chaillot. Avec la complicité du metteur en scène et philosophe Denis Guénoun, il donne chaleur et corps à cette réflexion philosophique sur le temps, entrée dans l'histoire de la littérature et de la pensée.

«Si personne ne me demande, je sais. Si on me le demande et que je veux l’expliquer, je ne sais plus.» Ce paradoxe fameux, entré dans l’histoire de la pensée et de la littérature, Augustin le profère lorsqu’il s’interroge au livre XI de ses Confessions, au plus profond de lui-même: que bien être le temps ?

Dans ses Confessions – un modèle pour toutes les autobiographies à venir, de Montaigne à Rousseau – Augustin l'Africain, évêque d'Hippone dans l’actuelle Algérie, au IVe siècle, s’inquiète très intimement de ce phénomène si familier et pourtant si étranger : le temps, pris dans un mouvement qui périme le présent à l’instant où il advient, issu d’un venir qui vient au devant et d’un passé qui l’aspire.

Dans une adresse franche à Dieu, inspirant tant de philosophes après elle, de Kant à Derrida, qui pourrait au fond n’être pas religieuse, Augustin élabore une pensée dynamique, agitée, secouée de doutes et de soubresauts, qui mime le mouvement du temps et suit celui de l’esprit. Ce temps présent est aussi celui de la représentation.

Denis Guénoun et Stanislas Roquette, le metteur en scène et l’interprète de ce puissant spectacle, l’ont bien compris, eux qui travaillent ces méandres de pensée, ravivant une réflexion habitée, taraudée entre l’intériorité du sentiment et l’extériorité du phénomène, sans jamais lever un œil au ciel. Car c’est au public que l'interprète s’adresse, et à soi.
 


 

Porté par la puissante traduction du poète Frédéric Boyer, limpide et sans ambages, réintitulée Les Aveux (P.O.L, 2008), Stanislas Roquette, sous l’œil informé et bienveillant du philosophe Denis Guénoun, donne la chaleur d’un corps à ces spéculations, dont le traducteur rappelle qu'elles instituent « une pratique d’écriture sur soi qui est transformatrice ».

Ces errements de pensée, en butte à des sentiments contraires et à des apories vécues commes des drames, prennent une tournure spéculative à la ténacité comique, digne de Devos. Car Augustin n’abandonne rien de sa rigueur et de son entêtement dans la difficulté. Il poursuit sans relâche la même interrogation :

« Qu’est-ce donc que le temps ? […] Je suis sûr de savoir que si rien ne passait, il n’y aurait pas de temps passé, et que si rien n’advenait, il n’y aurait pas de temps futur, et qui si rien n’était, il n’y aurait pas de temps présent. Ces deux temps, passé et futur, comment sont-ils puisque le passé n’est plus et que le futur n’est pas encore ? Et le présent, s’il était toujours présent, s’il ne passait pas dans le passé, il ne serait plus un temps mais l’éternité. Si le présent, pour être un temps, doit passer dans le passé, comment dire qu’il est puisqu’il est de n’être plus ? »

Alors? Alors Augustin, à force de persévérance, parvient à une conclusion philosophique: avenir, présent, passé, dans cet ordre, ne sont que le présent de l’avenir, soit l’attente, le présent du présent, soit l’attention ou l’observation, et le présent du passé, soit la mémoire. Futur, présent, passé, recouvrent ainsi trois modalités du présent, entre lesquelles sont tendues toutes les forces vives de l’esprit.

Manifestement fait pour être dit sur le vif, ce texte canonique gagne dans le présent de la représentation une dimension plus vertigineuse et infinie encore : dans quel présent et dans quel espace le corps du comédien se remémore-t-il le texte qu’il sait être à venir? Quelle est cette modalité du temps qui tire de la mémoire l’attente de l’avenir, au présent? Nulle spéculation ne répondra mieux à ces énigmes intimes et universelles que la vigueur et la joie d'une représentation. Sur le plateau du Théâtre de Chaillot, la trinité Denis Guénoun, Stanislas Roquette et Frédéric Boyer fait des miracles.

 

Informations pratiques
Qu'est-ce que le temps,
d'après le livre XI des Confessions d'Augustin
Nouvelle traduction de Frédéric Boyer : Les Aveux, P.O.L, 2008
 
Mise en scène de Denis Guénoun
Avec Stanislas Roquette
Lumières de Geneviève Soubirou
Musique de Franz Schubert
 
Production Artépo
Production déléguée TNP Villeurbanne
Coproduction Théâtre des deux rives – CDR de Haute-Normandie
 
Théâtre national de Chaillot
1, place du Trocadéro - 75016 Paris
Réservations: 01 53 65 30 00
www.theatre-chaillot.fr
Du 3 au 18 janvier 2014 à 20h30 du mardi au vendredi, à 19 heures le samedi et à 15h30 le dimanche
Salle Maurice-Béjart 
Durée: 1 heure
Pour aller plus loin
Le dialogue entre Yasmina Reza et Denis Guénoun: le théâtre est le contraire de la théorie
La chronique des Aveux. Nouvelle traduction des Confessions de Frédéric Boyer
L'exemple: Saint Augustin et le vol des poires
Algérie, Annaba. La cité de saint Augustin
La chronique de De l'intime. Loin du bruyant Amour de François Jullien

 

Expresso : les parcours interactifs
Popper et la science
Avec Popper, apprenez à distinguer théorie scientifique et pseudo-sciences, pour mieux débusquer les charlatans et (enfin) clouer le bec à ce beau-frère complotiste !
Découvrir Tous les Expresso
Sur le même sujet
Dialogue
7 min
Yasmina Reza et Denis Guénoun. Le pouvoir en scène
Nicolas Truong 04 juillet 2007

Peut-on philosopher sur un plateau ? Comment mettre de la pensée en scène ? De la supériorité du comique sur le tragique à l’impuissance de la philosophie lorsqu’elle quitte toute attache avec la vie, Yasmina Reza et Denis Guénoun…


Article
3 min
Les deux corps des présidents américains
Jean-Marie Pottier 06 octobre 2020

Dans Les Deux Corps du roi. Essai sur la théologie politique au Moyen Âge (1957), Ernst Kantorowicz donne une définition de cette « …

Les deux corps des présidents américains

Bac philo
6 min
Corrigés du bac philo – filière générale : Antoine-Augustin Cournot, “Essai sur les fondements de nos connaissances et sur les caractères de la critique philosophique”
Frédéric Manzini 15 juin 2022

La science a-t-elle le monopole de la vérité ? Oui, à en croire le savant et épistémologue Antoine-Augustin Cournot, selon l’extrait qui a…

Corrigés du bac philo – filière générale : Claude Lévi-Strauss, “La Pensée sauvage”

Article
5 min
Emmanuel Bourdieu : une tendance à s’engager à la poursuite de l’absolu
Cédric Enjalbert 06 février 2013

Auteur de « L’Homme qui se hait », mis en scène par Denis Podalydès au Théâtre de Chaillot jusqu’au 28 février, Emmanuel Bourdieu se penche sur la…

Emmanuel Bourdieu : une tendance à s’engager à la poursuite de l’absolu

Article
4 min
“Je suis Fassinder”: quand l’art remue nos contractions intimes et politiques
Cédric Enjalbert 17 mai 2016

De quoi nos peurs et nos replis identitaires sont-ils le nom ? Que peut dire aujourd’hui un artiste de l’état du monde ? Dans “Je suis Fassbinder”…

“Je suis Fassinder”: quand l’art remue nos contractions intimes et politiques

Article
2 min
Conférence de Martin Legros au Théâtre de l’Œuvre à Marseille le 20 octobre
03 octobre 2023

Gagnez des places pour deux conférences au Théâtre de l’Œuvre à Marseille le 20 octobre à 20H : « Machiavel en Ukraine » et «…

Conférence de Martin Legros au Théâtre de l’Œuvre à Marseille le 20 octobre

Article
2 min
Saint Augustin. Les Confessions
Mathilde Lequin 26 novembre 2014

C’est « avec les mots de l’âme et le cri de la pensée » que saint Augustin s’adresse à Dieu dans les Confessions. Car le terme de « confession » est ici à prendre dans son sens religieux : cette œuvre rédigée entre 397 et 400 est celle ..


Article
4 min
Côme de Bellescize : « Le théâtre, école de la complexité »
Cédric Enjalbert 03 septembre 2013

Quel sens donner à l'existence lorsque toute possibilité de communiquer nous est ôtée ? Peut-on préférer la mort à une vie diminuée ? Existe-t-il…

Côme de Bellescize : « Le théâtre, école de la complexité »

À Lire aussi
Michel Butor. « Je suis en quelque sorte en sursis »
Michel Butor. « Je suis en quelque sorte en sursis »
Par Michel Butor
juillet 2012
Festival Diderot: un théâtre de la liberté
Festival Diderot: un théâtre de la liberté
Par Cédric Enjalbert
septembre 2013
Denis Podalydès. La métamorphose du comédien
Par Martin Legros
octobre 2012
  1. Accueil-Le Fil
  2. Articles
  3. Les “Aveux” d'Augustin prennent corps, à Chaillot
Philosophie magazine n°178 - mars 2024
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Avril 2024 Philosophe magazine 178
Lire en ligne
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Réseaux sociaux
  • Facebook
  • Instagram
  • Instagram bac philo
  • Linkedin
  • Twitter
Liens utiles
  • À propos
  • Contact
  • Éditions
  • Publicité
  • L’agenda
  • Crédits
  • CGU/CGV
  • Mentions légales
  • Confidentialité
  • Questions fréquentes, FAQ
À lire
Bernard Friot : “Devoir attendre 60 ans pour être libre, c’est dramatique”
Fonds marins : un monde océanique menacé par les logiques terrestres ?
“L’enfer, c’est les autres” : la citation de Sartre commentée
Magazine
  • Tous les articles
  • Articles du fil
  • Bac philo
  • Entretiens
  • Dialogues
  • Contributeurs
  • Livres
  • 10 livres pour...
  • Journalistes
  • Votre avis nous intéresse