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Jerry Brown et Jean-Pierre Dupuy en 2018 © Manuel Braun

Jerry Brown, l’anti-Trump. Dialogue avec Jean-Pierre Dupuy

Jerry Brown, Jean-Pierre Dupuy, propos recueillis par Alexandre Lacroix publié le 14 février 2018 16 min

Gouverneur de Californie, Jerry Brown est à la tête de l’État le plus riche et le plus peuplé des États-Unis. À l’heure où Donald Trump claque la porte de l’accord de Paris sur le climat et brandit la menace atomique à l’encontre de la Corée du Nord, les engagements de ce démocrate pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre et contre la prolifération nucléaire détonnent. De passage à Paris, nous l’avons invité à dialoguer avec l’un de ses amis de longue date, le penseur du “catastrophisme éclairé” Jean-Pierre Dupuy.

Le 12  décembre dernier, pour le deuxième anniversaire de l’accord de Paris qui concluait la COP21, la France organisait le One Planet Summit. L’objectif de cette rencontre : remobiliser la communauté internationale sur le dossier du changement climatique, après que Donald Trump a annoncé avec fracas, le 1er juin 2017, le retrait des États-Unis. 

Mais, côté américain, ce sommet comptait tout de même un invité de marque : le gouverneur démocrate de Californie, Jerry Brown. Fils de Pat Brown, lui-même gouverneur de cet État de 1959 à 1967, Jerry Brown a été tenté par la vocation religieuse avant de rejoindre l’arène politique. Fait unique, il n’est pas concerné par une loi californienne qui interdit de remplir plus de deux mandats comme gouverneur, cette loi passée en 1990 ne s’appliquant pas à ceux qui avaient déjà été en fonction. Alors qu’il arrive au terme de son dernier mandat, sa popularité est considérable outre-Atlantique. Jerry Brown a redressé les finances désastreuses laissées par son prédécesseur, Arnold Schwarzenegger – la Californie a frôlé la faillite. Dans le vide idéologique qui a suivi la défaite d’Hillary Clinton, il représente, pour les opposants à Donald Trump – et ils sont nombreux –, l’autre voix de l’Amérique.

Le 13  décembre, Jerry Brown se voyait remettre un doctorat honoris causa par l’École normale supérieure dans ses locaux, rue d’Ulm, à Paris. Au sortir de cette cérémonie à laquelle assistait un panel de chercheurs, il s’est rendu à pied au domicile de son ami de longue date, le philosophe français Jean-Pierre Dupuy. Ce dernier fait partie des intimes mais aussi des conseillers informels de Brown – ils sont six ou sept à se réunir régulièrement, sans ordre du jour, pour « parler idées ». L’échange qui suit n’est donc pas un débat contradictoire. Il s’agit plutôt d’une réflexion à bâtons rompus autour de la question qui passionne les deux hommes : l’humanité est-elle promise à l’autodestruction, ou bien la catastrophe pourra-t-elle être évitée ? – Mais pourquoi une telle obsession ? Sans doute parce que Jerry Brown et Jean-Pierre Dupuy ont tous deux été proches du penseur de la décroissance, le philosophe Ivan Illich.

 

Jean-Pierre Dupuy : Nous nous sommes rencontrés pour la première fois à Paris, il y a plus de trente ans, autour d’Ivan Illich, dont nous étions proches.

 

Jerry Brown : Ivan Illich n’était pas l’un de ces intellectuels faciles, à la mode, que l’on croise dans les salons. Je me souviens avoir été attiré par ses essais, Une société sans école [1971] et Némésis médicale [1975], puis d’être allé le rencontrer dans les années 1970, au cœur d’un monastère zen près de San Francisco. Sa parole était rafraîchissante et vigoureuse. Il avait une manière de formuler les choses qui vous frappait, parce qu’il semblait voir des vérités qu’il était le seul à voir ; c’était fascinant, même si je ne savais pas trop si ses idées étaient applicables. Par exemple, lors de notre première rencontre, il a fait l’éloge du « chômage créateur », d’une vie libérée du salariat, ce qui, dans le contexte de la prospérité et du productivisme américains, s’apparentait à une hérésie. Sa perspective était indépendante, j’ai aimé le caractère anarchique de sa compréhension de l’existence humaine. À titre personnel, j’ai rejoint la Compagnie de Jésus dans ma jeunesse ; j’ai été formé de l’âge de 17 à 20 ans dans un séminaire jésuite où j’ai fait l’expérience du silence, de la méditation, de l’obéissance, de la distance par rapport à la consommation et à la technologie. On parlait latin. J’ai quitté cette retraite en 1960 pour reprendre des études à l’université de Berkeley. Mais l’arrière-plan catholique et spirituel de la démarche critique d’Illich a trouvé un écho en moi.

 

J.-P. D. : J’ai rencontré Illich en 1972, et ce fut pour moi un raz-de-marée. Je me souviens l’avoir vu d’abord dans une émission de télévision. Jean-Marie Domenach l’interviewait et a conclu en lui demandant son avis sur l’Église catholique. Illich a répondu : « L’église est une putain, mais c’est aussi ma mère. » Waouh ! Je me suis dit que ce gars sortait de l’ordinaire ! Il avait quand même étudié la philosophie à l’université grégorienne de Rome, été ordonné prêtre, il aurait pu devenir cardinal s’il était resté dans cette voie… À cette époque, j’ignorais la philosophie. J’étais un pur produit de l’École polytechnique, destiné à devenir un technocrate. Ma rencontre avec Illich a tout fait exploser. Je dirais, avec le recul, que c’est allé trop loin. N’importe, j’ai été tellement fasciné par sa pensée que je suis devenu son assistant. J’ai par exemple écrit avec lui la version française de Némésis médicale – non pas une simple traduction, mais l’approfondissement philosophique de concepts nouveaux, comme celui de contre-productivité. Je suis aussi l’auteur du fameux calcul sur la vitesse réelle de la voiture…

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Article issu du magazine n°117 février 2018 Lire en ligne
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