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© Gallimard coll. Folio

L’extrait

"Knock” de Jules Romains : “Je les mets au lit, et je regarde ce qui va pouvoir en sortir”

Jules Romains publié le 27 octobre 2020 3 min

Extrait de l’acte III, scène 4, de Knock ou le Triomphe de la médecine de Jules Romains, comédie en trois actes parue pour la première fois en 1924.

 

LE DOCTEUR PARPALAID, KNOCK 

[…]

 

LE DOCTEUR PARPALAID 

Vous allez dire que je donne dans le rigorisme, que je coupe les cheveux en quatre. Mais, est-ce que, dans votre méthode, l’intérêt du malade n’est pas un peu subordonné à l’intérêt du médecin ?

 

KNOCK  

Docteur Parpalaid, vous oubliez qu’il y a un intérêt supérieur à ces deux-là.

 

LE DOCTEUR  

Lequel ?

 

KNOCK  

Celui de la médecine. C’est le seul dont je me préoccupe.

 

Silence. Parpalaid médite.

 

LE DOCTEUR

Oui, oui, oui.

 

À partir de ce moment et jusqu’à la fin de la pièce, l’éclairage de la scène prend peu à peu les caractères de la Lumière Médicale […].

 

KNOCK  

Vous me donnez un canton peuplé de quelques milliers d’individus neutres, indéterminés. Mon rôle, c’est de les déterminer, de les amener à l’existence médicale. Je les mets au lit, et je regarde ce qui va pouvoir en sortir ; un tuberculeux, un névropathe, un artérioscléreux, ce qu’on voudra, mais quelqu’un, bon Dieu ! quelqu’un. Rien ne m’agace comme cet être ni chair ni poisson que vous appelez un homme bien portant.

 

LE DOCTEUR PARPALAID 

Vous ne pouvez cependant pas mettre tout un canton au lit !

 

KNOCK  

Cela se discuterait. Car j’ai connu, moi, cinq personnes de la même famille, malades toutes à la fois, au lit toutes à la fois, et qui se débrouillaient fort bien. Votre objection me fait penser à ces fameux économistes qui prétendaient qu’une grande guerre moderne ne pourrait pas durer plus de six semaines. La vérité, c’est que nous manquons tous d’audace, que personne, pas même moi, n’osera allez jusqu’au bout et mettre toute une population au lit, pour voir, pour voir ! Mais soit ! Je vous accorderai qu’il faut des gens bien portants, ne serait-ce que pour soigner les autres, ou former, à l’arrière des malades en activité, une espèce de réserve. […]

 

LE DOCTEUR  

Il subsiste pourtant une sérieuse difficulté.

 

KNOCK  

Laquelle ?

 

LE DOCTEUR  

Vous ne pensez qu’à la médecine… Mais le reste ? Ne craignez-vous pas qu’en généralisant l’application de vos méthodes, on n’amène un certain ralentissement des autres activités sociales dont plusieurs sont, malgré tout, intéressantes ?

 

KNOCK  

Ça ne me regarde pas. Moi, je fais de la médecine.

 

LE DOCTEUR  

Il est vrai que lorsqu’il construit sa ligne de chemin de fer, l’ingénieur ne se demande pas ce qu’en pense le médecin de campagne.

 

KNOCK  

Parbleu ! (Il remonte vers le fond de la scène et s’approche d’une fenêtre.) Regardez un peu ici, docteur Parpalaid. Vous connaissez la vue qu’on a de cette fenêtre. Entre deux parties de billard, jadis, vous n’avez pu manquer d’y prendre garde. C’est un paysage rude, à peine humain, que vous contempliez. Aujourd’hui, je vous le donne tout imprégné de médecine, animé et parcouru par le feu souterrain de notre art. La première fois que je me suis planté ici, au lendemain de mon arrivée, je n’étais pas trop fier ; je sentais que ma présence ne pesait pas lourd. Ce vaste territoire se passait insolemment de moi et de mes pareils. Mais maintenant, j’ai autant d’aise à me trouver ici qu’à son clavier l’organiste des grandes orgues. Dans deux cent cinquante de ces maisons – il s’en faut que nous les voyions toutes à cause de l’éloignement et les feuillages – il y a deux cent cinquante chambres où quelqu’un confesse la médecine, deux cent cinquante lits où un corps étendu témoigne que la vie a un sens, et grâce à moi un sens médical. La nuit, c’est encore plus beau, car il y a les lumières. Et presque toutes les lumières sont à moi. Les non-malades dorment dans les ténèbres. Ils sont supprimés. Mais les malades ont gardé leur veilleuse ou leur lampe. Tout ce qui reste en marge de la médecine, la nuit m’en débarrasse, m’en dérobe l’agacement et le défi. Le canton fait place à une sorte de firmament dont je suis le créateur continuel. Et que je ne vous parle pas des cloches. Songez que, dans quelques instants, il va sonner dix-heures, c’est la deuxième prise de température rectale, et que, dans quelques instants, deux cent cinquante thermomètres vont pénétrer à la fois… 

[…]

 

Jules Romains, Knock ou le Triomphe de la médecine (1924), acte III, scène 4 (extrait)

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