Le décryptage

La santé, Un symptôme social ?

Octave Larmagnac-Matheron publié le 2 min

Illustration © William L.

Les inégalités socio-économiques se répercutent très fortement sur la santé : c’est ce que confirme une étude récente de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), qui s’intéresse spécifiquement aux maladies chroniques. Sur la période étudiée (2016-2017), le risque de développer un problème de santé chronique au sein des 10 % les plus modestes de la population française était 2,8 fois supérieur pour le diabète et 2,2 fois plus pour les maladies du foie ou du pancréas. En cause : l’alimentation (excès de sucre, de gras, d’alcool). La même tendance s’observe également pour les maladies psychiatriques : les Français les plus modestes sont 2,8 fois plus nombreux à vivre avec une dépression, une psychose, etc. Conditions de vie difficiles, solitude, difficulté d’accès aux soins, tabou du diagnostic dans les milieux populaires… Les facteurs de cette surexposition sont multiples. Ces écarts se retrouvent en grande partie entre les catégories socioprofessionnelles : « Les ouvriers et employés développent plus souvent une maladie chronique que les cadres et professions intellectuelles supérieures », résument les auteurs de l’enquête. Seuls les cancers, dont une grande partie des causes sont environnementales – et donc partagées collectivement –, semblent échapper à ce déterminisme socio-économique : leur prévalence se répartit donc uniformément dans la population.

Dans l’ensemble, la santé reste un enjeu de justice trop souvent éludée au motif qu’elle serait une question purement biologique, naturelle, comme le notent Didier Fassin, Hélène Grandjean, Monique Kaminski et Thierry Lang dans l’ouvrage collectif Les Inégalités sociales de santé (2000) : « Si certains ont plus de risques de développer certaines affections ou une probabilité plus élevée de mourir jeunes, ce n’est pas seulement le fruit du hasard ou de l’hérédité, mais bien également le résultat d'une production par la société. » Raison pour laquelle, selon les auteurs, il est nécessaire de politiser cette question.

Source : « Les maladies chroniques touchent plus souvent les personnes modestes et réduisent davantage leur espérance de vie », sous la direction de Samuel Allain, avec la collaboration de Vianney Costemalle, Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, Études et resultats, n° 1 243, 6 octobre 2022.
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