Lorsque la conscience paraît
La conscience peut apparaître chez le fœtus dès le troisième trimestre de la grossesse, et pas après la naissance : c’est ce que défend une étude récemment parue dans la revue scientifique spécialisée Trends in Cognitive Sciences. Loin des polémiques sur le droit à l’avortement, cette hypothèse pose une question métaphysique essentielle : quand vient-on au monde comme individu ou comme esprit ? Plusieurs philosophes proposent leurs réponses. Attachez vos ceintures !
Jan Patočka : la naissance, une séparation indispensable
Quand suis-je né ? Le philosophe tchécoslovaque Jan Patočka, soucieux de dépasser l’opposition entre le sujet et l’objet, est l’un des premiers à prendre au sérieux cette question, notamment dans Le Monde naturel et le Mouvement de l’existence humaine. À ses yeux, la conscience est indissociable d’un corps, elle est incarnée. Comprendre la naissance de la conscience, c’est concevoir un événement biologique par lequel ma chair se sépare du monde et devient capable, dans la dynamique propre de cette séparation, de faire paraître les choses à distance d’elle-même. Cet événement décisif est la « séparation d’avec le corps de la mère » – rupture d’adhérence. « C’est du monde que nous naissons ; nous nous séparons en naissant de la cohérence d’ensemble de ses processus, nous devenons quelque chose pour nous-mêmes. »
Que se passe-t-il dans la naissance ? À partir de son expulsion, le nourrisson s’éprouve dans son « incomplétude essentielle ». Il ne se suffit pas à lui-même, au contraire de la vie fœtale qui s’apparentait à une plénitude. Raison pour laquelle il doit d’emblée sortir de lui, se tourner vers le dehors. Le petit d’homme demeure pourtant, dans son immaturité, incapable de satisfaire par lui-même ses besoins. Son besoin organique est redoublé d’un besoin d’autrui. « La dépendance est la situation de ce qui est séparé, de ce qui est pour soi. L’être doté d’une existence autonome est surtout dépendant là où le contact avec l’extérieur qu’exige la satisfaction de ses besoins doit être médiatisé par d’autres êtres, qui lui procurent les choses de l’environnement qu’il lui faut pour se compléter. » Le nourrisson s’attache à ses parents qui prennent soin de lui, « de telle manière que tout ce qui le met à part et le renvoie à lui-même soit de ce fait activement surmonté » : la séparation de la « première individuation physique » est comme résorbée dans cette « fusion ». « L’espace intime est comme une continuation de la communication intra-utérine de la mère et de l’enfant ».
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