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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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Rassemblement de femmes place de la République, à Paris, le 8 mars 2018. Manifestantes portant des pancartes à l’effigie de femmes féministes célèbres (Simone de Beauvoir, Nina Simone, Simone Veil, Colette, Winnie Harlow). © Lily Franey/Gamma-Rapho

Ma joyeuse journée du 8 mars

Ariane Nicolas publié le 08 mars 2024 4 min

« J’ai bien de la chance. Le 8 mars, ce n’est pas seulement la Journée internationale des droits des femmes, c’est aussi… mon anniversaire ! Deux événements joyeux en un, qui chaque année, me font m’interroger sur mon rapport intime au féminisme. 

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Naître un 8 mars fait-il de nous une féministe ? Non, bien évidemment, pas plus que naître un 24 décembre à minuit fait de nous Jésus. Je me sens toutefois heureuse et même flattée de pouvoir associer ces deux points cardinaux de mon existence : ma vie et mon combat féministe. Mes ami(e)s ne se privent pas de me le rappeler, d’ailleurs : “Ariane, c’est simple de se souvenir de son anniversaire, c’est le 8 mars, comme la Journée des droits des femmes !” Non pas que je sois une féministe exemplaire, loin s’en faut. Je doute d’ailleurs que quiconque puisse prétendre au titre. Mais c’est comme si, symboliquement, j’avais hérité d’une petite charge consistant à ne pas trahir les idéaux d’égalité célébrés en ce jour si particulier. En un sens, cette coïncidence m’oblige.

La première fois que j’ai prononcé sérieusement le mot de “féminisme”, je crois que c’était lors de mon oral du bac de français, en première. J’étais tombée sur un texte de Jean-Paul Sartre, et la discussion avait dérivé sur son entourage. “Connaissez-vous d’autres noms qui lui sont associés, des gens qui auraient influencé sa vie ?”, demande l’examinatrice, qui avait clairement le nom de Beauvoir en tête. Je sèche. “Simone de Beauvoir, cela vous dit quelque chose ?” Pour tenter de gagner un point, je lance : “Ah oui, la féministe !” “Entre autres…”, sourit mon interlocutrice, surprise que je ne dise pas plutôt “Ah oui, sa compagne !” J’avais dû entendre le nom de Beauvoir quelque part, mais à l’époque, j’ignorais que les deux philosophes avaient soudé leurs destins.

Comprendre comment le féminisme vient à nous est une question délicate. Ma collègue Clara Degiovanni a posé la question à cinq philosophes, cette semaine, et leurs réponses sont à la fois éclairantes, incongrues et émouvantes. Pour ma part, je crois que les choses se sont faites progressivement, à force de lectures et de discussions, et j’ai mis plus de quinze ans avant d’assumer de dire : “Je suis féministe.” Mais un événement est sans doute venu coaliser cette évolution. Il y a quelques années, j’ai rompu avec un homme que j’aimais, en me référant non pas à mon intuition, à mes aspirations ou à mes facultés – j’aurais pu tenir des années dans la situation difficile que je vivais – mais à des arguments féministes. J’ai mis les principes au-dessus de ma sécurité matérielle et affective. Ce jour-là, agir en féministe a redéfini mon identité, pour très longtemps.

Devenir féministe a donc consisté en une prise de risque. Mais ce saut vertigineux, cette mise en danger au nom d’une idée indéfectible de l’égalité femmes-hommes, je me demande si au fond, je ne la portais pas en moi depuis toujours. Quand j’étais petite, je tentais d’échapper, plus ou moins consciemment, à la panoplie du conditionnement féminin. Imitant mes grands frères, je préférais jouer aux GI-Joes plutôt qu’à la dînette, faire du feu plutôt que la cuisine, conduire un scooter plutôt qu’aller à la danse. J’ai fumé et bu de l’alcool très tôt, j’aimais jurer et marcher dans la boue, répondre aux profs et traîner avec des garçons. Je n’avais pas lu Beauvoir mais j’avais l’instinct égalitaire – cela m’a évidemment été reproché. Je pense que de nombreuses copines aspiraient à faire de même, mais n’avaient pas la liberté familiale ni les modèles adéquats pour oser sauter le pas.

Il y a une définition du féminisme que j’aime beaucoup, que l’on doit à Michèle Le Dœuff, l’une des pionnières des études féministes en France. “Une féministe est une femme qui ne laisse à personne le soin de penser à sa place.” Si l’on suit cette conception, alors je crois que j’ai toujours été féministe, du moins en mon for intérieur. Par la suite, lire des textes, échanger avec mes amies ou mes collègues, a permis de me donner de la force, en me sentant soutenue collectivement dans mes choix. Ainsi, le 8 mars, je reçois des cadeaux, mais j’éprouve surtout une immense gratitude envers toutes ces femmes qui m’ont permis de vivre cette journée de manière plus joyeuse que si j’étais née il y a un siècle, car Dieu seul sait dans quelles conditions de servitude j’aurais été contrainte de vivre. Ces combattantes m’ont peut-être fait le plus beau cadeau qui soit. »

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