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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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Illustration ©William L. - Marx ©Photo Re-Pubblic/Leemage - Engels ©Whiteimages/Leemage

 

L’aventure d’un classique

“Manifeste du parti communiste”. Les extraits

publié le 13 janvier 2022 16 min

Cela peut paraître paradoxal, mais ce sont bien deux membres de la bourgeoisie, Karl Marx (1818-1883) et Friedrich Engels (1820-1895), qui donnent au prolétariat les armes théoriques de sa mobilisation et de son émancipation. Avec le Manifeste du parti communiste, ils amorcent un mouvement révolutionnaire dont les soubresauts sont encore perceptibles aujourd’hui. Nous publions des extraits de ce texte, traduits par Laura Lafargue.

 

 

Un spectre hante l’Europe : le spectre du communisme. Toutes les puissances de la vieille Europe se sont unies en une Sainte Alliance pour traquer ce spectre : le pape et le tsar, Metternich [chancelier d’État de l’Empire d’Autriche] et Guizot [président du Conseil des ministres français et ministre des Affaires étrangères], les radicaux de France et les policiers d’Allemagne.

Quel est le parti d’opposition qui n’a pas été accusé de communisme par ses adversaires au pouvoir ? Quel est le parti d’opposition qui, à son tour, n’a pas renvoyé aux opposants plus avancés que lui tout comme à ses adversaires réactionnaires le grief infamant de communisme ?

Il en résulte un double enseignement. 

Déjà le communisme est reconnu par toutes les puissances européennes comme une puissance. 

Il est grand temps que les communistes exposent, à la face du monde entier, leurs conceptions, leurs buts et leurs tendances ; qu’ils opposent aux fables que l’on rapporte sur ce spectre communiste un manifeste du parti lui-même. 

C’est à cette fin que des communistes de diverses nationalités se sont réunis à Londres et ont rédigé le manifeste suivant, publié en anglais, français, allemand, italien, flamand et danois.

 

I

Bourgeois et prolétaires

 

L’histoire de toute société jusqu’à nos jours est l’histoire de luttes de classes. 

Homme libre et esclave, patricien et plébéien, baron et serf, maître de jurande [chef d’un corps de métier] et compagnon, bref oppresseurs et opprimés, en opposition constante, ont mené une lutte ininterrompue, tantôt ouverte, tantôt dissimulée, une lutte qui finissait toujours soit par une transformation révolutionnaire de la société tout entière, soit par la disparition des deux classes en lutte.

Dans les premières époques historiques, nous constatons presque partout une structuration achevée de la société en corps sociaux distincts, une hiérarchie extrêmement diversifiée des conditions sociales. Dans la Rome antique, nous trouvons des patriciens, des chevaliers, des plébéiens, des esclaves ; au Moyen Âge, des seigneurs, des vassaux, des maîtres, des compagnons, des serfs et, de plus, dans presque chacune de ces classes une nouvelle hiérarchie particulière. 

La société bourgeoise moderne, élevée sur les ruines de la société féodale, n’a pas aboli les antagonismes de classes. Elle n’a fait que sub­stituer de nouvelles classes, de nouvelles conditions d’oppression, de nouvelles formes de lutte à celles d’autrefois. 

Cependant, le caractère distinctif de notre époque, de l’époque de la bourgeoisie, est d’avoir simplifié les antagonismes de classes. La société entière se scinde de plus en plus en deux vastes camps ennemis, en deux grandes classes qui s’affrontent directement : la bourgeoisie et le prolétariat. 

Des serfs du Moyen Âge naquirent les citoyens des premières communes ; de cette population municipale sortirent les premiers éléments de la bourgeoisie. 

La découverte de l’Amérique, la circumnavigation de l’Afrique offrirent à la bourgeoisie montante un nouveau champ d’action. Les marchés des Indes orientales et de la Chine, la colonisation de l’Amérique, le commerce colonial, la multiplication des moyens d’échange et, en général, des marchandises donnèrent un essor jusqu’alors inconnu au négoce, à la navigation, à l’industrie et assurèrent, en conséquence, un développement rapide à l’élément révolutionnaire de la société féodale en décomposition. 

L’ancien mode d’exploitation féodal ou corporatif de l’industrie ne suffisait plus aux besoins qui croissaient sans cesse à mesure que s’ouvraient de nouveaux marchés. La manufacture prit sa place. La classe moyenne industrielle supplanta les maîtres de jurande : la division du travail entre les différentes corporations céda la place à la division du travail au sein de l’atelier même. 

Mais les marchés s’agrandissaient sans cesse : les besoins croissaient toujours. La manufacture, à son tour, devint insuffisante. Alors la vapeur et la machine révolutionnèrent la production industrielle. La grande industrie moderne supplanta la manufacture ; la classe moyenne industrielle céda la place aux millionnaires de l’industrie, aux chefs de véritables armées industrielles, aux bourgeois modernes.

La grande industrie a créé le marché mondial, préparé par la découverte de l’Amérique. Le marché mondial a accéléré prodigieusement le développement du commerce, de la navigation, des voies de communication. Ce développement a réagi en retour sur l’extension de l’industrie ; et, au fur et à mesure que l’industrie, le commerce, la navigation, les chemins de fer se développaient, la bourgeoisie se développait, décuplant ses capitaux et refoulant à l’arrière-plan les classes léguées par le Moyen Âge. 

La bourgeoisie, nous le voyons, est elle-même le produit d’un long processus de développement, d’une série de révolutions dans le mode de production et d’échange. 

Chaque étape de développement de la bourgeoisie s’accompagnait d’un progrès politique correspondant. Corps social opprimé par le despotisme féodal, association armée s’administrant elle-même dans la commune, ici république urbaine indépendante, là tiers état taillable et corvéable de la monar­chie, puis, durant la période manufacturière, contrepoids de la noblesse dans la monarchie féodale ou absolue, pierre angulaire des grandes monarchies, la bourgeoisie, depuis l’établissement de la grande industrie et du marché mondial, s’est finalement emparée de la souveraineté politique exclusive dans l’État représentatif moderne. Le pouvoir étatique moderne n’est qu’un comité chargé de gérer les affaires communes de la classe bourgeoise tout entière. 

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