Nécrologie

Mort de Jean Salem, spécialiste du matérialisme philosophique

Cédric Enjalbert publié le 2 min
Le philosophe Jean Salem est mort. Enseignant à la Sorbonne, il était un spécialiste du matérialisme et de Marx.

Spécialiste du matérialisme philosophique et de la pensée de Marx, le philosophe Jean Salem est mort à l’âge de 65 ans, dans la nuit du 13 au 14 janvier 2018, d’une tumeur au cerveau.

Né le 16 novembre 1952 à Alger, Jean Salem était le fils d’Henri Alleg, auteur de La Question, un ouvrage remarqué dénonçant l'usage de la torture par l'armée française durant la guerre en Algérie. Après des études en économie, en histoire, en sciences politiques, en art et même en médecine, il opte pour la philosophie et devient professeur au lycée puis à l’université.

Après avoir longtemps tenu un séminaire d’histoire du matérialisme à la Sorbonne (de 1998 à 2008), « en s’attachant par-dessus tout à restituer le sens d’une éthique qui a osé proclamer que le souverain bien réside dans la volupté », notamment défendue par Démocrite, Épicure, Lucrèce, il a initié à partir de 2005 un séminaire consacré à « Marx au XXIe siècle ».

 

Se livrant, l’âge venu, à ce qu’il appelait avec humour « l’art de l’anecdotage », il est revenu sur son parcours intellectuel, sur le combat politique hérité de ses parents et sur son engagement communiste dans Résistances un livre d’entretiens menés avec Aymeric Monville (Delga, 2015).

Citant Épicure dans un essai sur Démocrite, Épicure, Lucrèce. La Vérité du minuscule (Encre Marine 1998 ; réed. 2014), le philosophe rappelait l’importance de l’enseignement matérialiste, contre toute forme de croyance en dans les arrière-mondes, et pour la libre pensée qu’il avait fait sienne : « Nous sommes nés une fois, il n’est pas possible de naître deux fois, et il faut n’être plus pour l’éternité ; aussi ne faudra-t-il pas sortir de la vie comme si l’on venait tout juste de naître ». En ne cessant d’écrire et d’enseigner, cette maxime Jean Salem l’avait fait sienne, tâchant de raviver l’ambition marxiste de « changer la vie ».

Expresso : les parcours interactifs
Joie d’aimer, joie de vivre
À quoi bon l'amour, quand la bonne santé, la réussite professionnelle, et les plaisirs solitaires suffiraient à nous offrir une vie somme toute pas trop nulle ? Depuis le temps que nous foulons cette Terre, ne devrions nous pas mettre nos tendres inclinations au placard ?
Pas si vite nous dit Spinoza, dans cet éloge à la fois vibrant, joyeux et raisonné de l'amour en général.
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