Mary Wollstonecraft, “Défense des droits de la femme”
La vie de Mary Wollstonecraft, en dépit des adversités, est à l’image de son œuvre : audacieuse, libre et fougueuse. Philosophe enthousiasmée par la Révolution française, elle s’efforça de faire entendre la voix des femmes dans ce moment de transformation radicale, afin de rompre avec les oppressions du passé. Auteur de Défense des droits de la femme, elle est souvent considérée comme la « Olympe de Gouges anglaise ».
Contexte
La Défense des droits de la femme est rédigée par Wollstonecraft en réaction aux propositions que Talleyrand présente, en 1791, à l’Assemblée constituante : celui-ci préconisait en effet de limiter l’éducation des jeunes filles à un enseignement à caractère domestique. Wollstonecraft s’insurge : hommes et femmes sont d’égale dignité morale et d’égale capacité intellectuelle ; les deux sexes méritent donc de bénéficier de la même qualité d’instruction. Si les femmes paraissent inférieures aux yeux du plus grand nombre, c’est précisément en raison de la société patriarcale qui les prive d’une éducation suffisante, et les mettent hors d’état de faire fructifier leurs talents.
« Endoctrinées dès leur enfance à croire que la beauté est le sceptre de la femme, leur esprit prend la forme de leur corps et, enfermé dans cette cage dorée, ne cherche qu’à décorer sa prison. » Privées d’une formation adéquate de leur raison, les femmes ne peuvent que sombrer dans l’excès de sensiblerie qu’on leur impute. Une seule solution pour briser ce schéma : éduquer garçons et filles « sur le même modèle », dans des écoles mixtes, afin que les femmes ne soient plus des « épouses » potiches mais deviennent de véritables « compagnes ».
L’extrait
« Si les Femmes doivent être exclues de la participation aux droits naturels du genre-humain, et totalement privées de donner leurs voix, du moins dans ce qui les concerne particulièrement, prouvez d’abord, pour vous laver du reproche d’injustice et d’abus, qu’elles manquent de raison : autrement cette tache dans votre nouvelle constitution, la première qui ait été fondée sur la raison, témoignera toujours aux siècles à venir, que l’homme ne peut s’empêcher d’agir en tyran, et la tyrannie dans quelque partie de la société qu'elle lève son front d’airain, détruira toujours la moralité. […]
J’espère trouver grâce aux yeux de mon propre sexe, si je traite les Femmes comme des créatures raisonnables, au lieu de flatter leurs attraits séducteurs, et de les regarder comme dans un état d’enfance perpétuelle, qui les rend incapables de se soutenir sans lisières. Je désire vivement de montrer en quoi consiste la véritable dignité, la félicité réelle de l’homme. Je désire persuader aux Femmes qu’elles doivent tâcher d’acquérir la force de l’âme et du corps, et les convaincre que des phrases mielleuses, la sensibilité exagérée du cœur, la délicatesse outrée de sentiments, et le raffinement exquis du goût sont presque synonymes des différentes épithètes consacrées à exprimer la faiblesse. En un mot, que ces êtres qui ne sont que des objets de pitié, et de cette espèce d’affection qu’on a nommé tendresse, ne tarderont pas à devenir les objets du mépris.
Laissant donc de côté ces jolies petites phrases féminines, dont les hommes ont la complaisance de faire usage pour nous adoucir notre dépendance servile, et dédaignant cette élégance qui annonce la mollesse de l’âme, cette sensibilité exquise, cette docilité si douce, cette souplesse de mœurs que l’on suppose les caractéristiques sexuelles d’une enveloppe plus faible, je souhaite faire voir que l’élégance est au-dessous de l’énergie de la vertu, que le premier objet d’une ambition louable doit être d’obtenir un caractère marquant, comme être humain, sans égard à la différence du sexe, et qu’on ne saurait mieux juger les vues secondaires, qu’en les éprouvant à cette pierre de touche. »
Extrait de Défense des droits de la femme, Épître dédicatoire & Introduction, Buisson, Paris, 1792
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