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© Count Chris/Unsplash

Entretien

Non au culte du bonheur !

Juliane Marie Schreiber, propos recueillis par Dominik Erhard publié le 19 mai 2022 8 min

Voir le positif en toutes circonstances : telle est la grande injonction sociale de notre époque, analyse la politologue allemande Juliane Marie Schreiber. Et de s’inquiéter du peu de place laissé, désormais, aux expériences négatives.

 

Accélération de la transition écologique, libération de l’Europe face aux hydrocarbures russes, etc. : certains commentateurs s’efforcent de trouver du positif jusque dans le conflit en Ukraine. Qu’en pensez-vous ?

Juliane Marie Schreiber : Je considère cela comme une indication que nous vivons dans une culture de la positivité qui a totalement changé nos standards de bonheur. Quiconque n’est pas constamment ravi aujourd’hui semble presque dysfonctionnel, comme s’il ne contrôlait pas sa vie. Être de mauvaise humeur pendant quelques jours dépasse les limites de ce qui est désormais considéré comme acceptable ! Nous nous efforçons de maintenir notre prestige en matière de bonheur.

“Être de mauvaise humeur pendant quelques jours dépasse les limites de ce qui est désormais considéré comme acceptable” Juliane Marie Schreiber

 

Que voulez-vous dire ?

Le bonheur est devenu une forme de statut social que nous devons constamment communiquer aux autres. Si ce signal de positivité fait défaut, ce défaut est immédiatement perçu comme problématique de l’extérieur. Le bonheur est devenu une sorte de norme, tout ce qui est « en dessous » de cet état est jugé déficitaire. Il y a au moins trois raisons à cela. Tout d’abord, le récit de croissance ne s’est pas arrêté aux portes de notre psyché. Même en matière d’émotions, nous considérons que tout doit avancer, s’améliorer, évoluer – raison pour laquelle nous essayons toujours de trouver du positif même dans les moments les plus terribles. « La crise comme opportunité » est le slogan de notre époque. C’est le deuxième point : le récit du capitalisme tardif, selon lequel les choses négatives n’arrivent que pour que l’on puisse s’en sortir. C’est un point de vue manifestement pervers. Bien des choses arrivent en réalité dont rien de positif ne découle du tout. Pensez à la guerre ou aux maladies graves comme le cancer.

 

Et la troisième raison ?

La troisième raison, qui est dans une certaine mesure la plus profonde, tient à cette exigence typique de notre méritocratie néolibérale : l’activité vaut toujours mieux que la passivité. L’action est récompensée – même si elle est irréfléchie et n’est d’aucune utilité pour personne. Si nous nous trouvons désemparés, nous rejetons la responsabilité sur l’individu, qui a soi-disant toutes les cartes entre ses mains. Même face aux pires coups du destin, nous disons que « c’est une question de point de vue » – ce qui n’est tout simplement pas vrai. En tant que société, nous sommes très mauvais pour gérer la douleur. Nous externalisons la souffrance et espérons que le principe du « loin des yeux, loin du cœur » s’appliquera. Les gens meurent dans des institutions, plus dans le cercle familial ; nous prenons d’énormes quantités d’analgésiques ; et globalement, nous orientons notre vie vers la recherche d’un confort absolu dans la plupart des domaines.

Traduit par Octave Larmagnac-Matheron
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