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(cc) Unsplash / Benjamin Child

Réparer le ciel

Dominique Bourg, David Keith, Clive Hamilton, Bernadette Bensaude-Vincent, Olivier Boucher, propos recueillis par Cédric Enjalbert publié le 22 octobre 2015 16 min

Et si nous ne parvenions pas à réduire rapidement nos émissions de gaz à effet de serre ? Pour parer à ce scénario catastrophe, pourtant probable, des scientifiques et des ingénieurs imaginent un « plan B ». Ils espèrent rétablir l’équilibre climatique en « jouant » avec le ciel, le soleil et la mer. Enquête.

Avez-vous déjà calculé votre bilan carbone ? Je me suis prêté à un petit calcul à l’occasion de cette enquête : un aller-retour en train entre Paris et Zurich représente une émission de 5 kilogrammes de dioxyde de carbone (CO2) par personne dans l’atmosphère, soit la capacité d’absorption moyenne d’un arbre en un an. L’entreprise suisse Climeworks, une start-up en pointe sur les techniques de capture du CO2 dans l’air, a conçu une machine dont les performances permettent d’en absorber près de 135 kilogrammes par jour, soit l’équivalent de l’activité de vingt-sept arbres pendant un an. Mieux, les ingénieurs envisagent de concevoir des collecteurs de taille industrielle capturant jusqu’à plusieurs tonnes de CO2 par heure. De quoi « réparer le ciel » et rectifier le dérèglement climatique ? Pas si vite.

«L’entreprise n’envisage de capter le CO2 qu’à des échelles de l’ordre de quelques centaines de tonnes quotidiennement, ce qui n’a qu’un effet minime sur le climat»

Dominique Kronenberg, directeur de l'exploitation chez ClimeWorks

Pour en savoir plus, je me rends à Zurich, où l’un de ces rares prototypes est visible. Au 155 Birchstrasse, au cœur du Technopark, un bâtiment aux allures de hangar. Dominique Kronenberg m’accueille d’un signe de main. Ce gaillard aux larges yeux bleus dirige l’exploitation, aux côtés des fondateurs de Climeworks, Jan Wurzbacher et Christoph Gebald. Nous empruntons l’ascenseur. Au rez-de-chaussée un ballet de transpalettes. À l’étage le silence de l’open-space. À l’entrée, un large panneau siglé au nom de l’entreprise rappelle curieusement le logo de la Nasa. La start-up partage avec elle un goût pour les projets d’avenir. Elle a recruté une quinzaine d’ingénieurs, de mathématiciens et de chercheurs en mécanique. Une poignée d’entre eux s’échine à faire voler un hélicoptère miniature dans les couloirs de l’entreprise. Dans la salle de réunion, une large photo des dirigeants tout sourire rappelle les prix et les distinctions gagnés par l’entreprise : Climeworks est notamment finaliste du Virgin Earth Challenge, initié en 2007 par le fondateur de Virgin, le milliardaire sir Richard Branson, en compagnie d’Al Gore. À la clé, un prix de 25 millions de dollars. Qui remportera le pactole ? Le géo-ingénieur qui parviendra à proposer un procédé viable économiquement, susceptible de parvenir à « une élimination nette des gaz à effet de serre atmosphériques d’origine anthropique, chaque année, pendant au moins dix ans ». À ce jour, parmi la douzaine de finalistes, personne n’a été en mesure de relever le défi. D’ailleurs, Climeworks ne se distingue pas d’emblée par son souci écologique. « Nous ne sommes pas des “sauveurs du climat”, précise Dominique Kronenberg, et nous ne nous considérons pas à proprement parler comme des géo-ingénieurs. Aujourd’hui, l’entreprise n’envisage de capter le CO2 qu’à des échelles moyennes, de l’ordre de quelques centaines de tonnes quotidiennement, ce qui n’a qu’un effet minime sur le climat. Mais il est déjà possible de tirer une application économiquement viable de cette technique, bénéfique pour l’environnement. Climeworks essaie de produire une ressource et de la commercialiser. Cette ressource est le dioxyde de carbone, qu’il est non seulement possible de recycler dans l’industrie cosmétique, la fabrication de sodas et d’eaux gazeuses, mais dont on peut aussi tirer un carburant dont l’émission de CO2 est “neutre”. »

Dominique Kronenberg m’invite à reprendre l’ascenseur, puis à traverser un grand atelier où sont montées les machines conçues par les têtes pensantes à l’étage. Quelques portes franchies et nous voici dans une cour à l’ombre des bâtiments. Dans un angle, une machine tenant de l’alambic à hélice fonctionne dans un souffle imperceptible et continu. « Le ventilateur fait circuler l’air, qui passe ensuite dans un filtre solide sur lequel se fixent les particules de CO2. Une forte chaleur les détache,  pour récupérer le dioxyde de carbone sous forme gazeuse, incolore et inodore. » La machine arbore un logo Audi sur l’une de ses faces. Climeworks a noué un partenariat avec le constructeur automobile pour concevoir un « carburant neutre ». Entendons-nous : lorsqu’il est brûlé dans un moteur, il rejette bien du CO2, mais dans une proportion égale à celle qui a été préalablement absorbée dans l’atmosphère. Le bilan de ce carburant de synthèse, qui n’entame pas les ressources fossiles, est donc dit neutre. « Notre technique n’est pas au point pour “nettoyer” l’atmosphère à l’échelle mondiale. Elle demeure notamment trop chère par rapport au système communautaire d’échange de quotas d’émission, ce marché européen du CO2 instaurant la possibilité d’acheter ou de revendre un “droit à polluer”. La tonne de carbone dans ce marché approche 25 à 30 euros, soit entre 5 et 10 fois moins que le prix de la tonne produite par nos machines ! Par ailleurs, personne ne sait vraiment que faire du carbone stocké. Des entreprises essaient bien de le séquestrer dans l’eau ou dans le sol, mais ces essais demeurent très controversés. Climeworks ne fait donc pas disparaître le CO2, elle le recycle en circuit fermé. »

 

Un défi politique

La petite entreprise suisse, financée par des investisseurs privés et soutenue par les administrations publiques, empochera-t-elle les millions promis par sir Richard Branson avec son invention ? Rien n’est moins sûr. Personne ne sait d’ailleurs quand le prix sera décerné… Une douzaine de concurrents s’affrontent sous l’œil d’un jury composé de scientifiques, tels le célèbre climatologue James E. Hansen ou le penseur environnementaliste James Lovelock, initiateur de l’« hypothèse Gaïa ».

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Article issu du magazine n°94 octobre 2015 Lire en ligne
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