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Annie Le Brun et Philippe Mangeot en 2020 © Édouard Caupeil

Annie Le Brun-Philippe Mangeot. L’art de ne pas se laisser amoindrir

Annie Le Brun, Philippe Mangeot, propos recueillis par Frédéric Gros publié le 09 juin 2020 10 min

L’amour, la jeunesse, la révolte, le romantisme : voici les angles saillants de la passion pour la vie que partagent le professeur et militant Philippe Mangeot et l’essayiste Annie Le Brun. L’un a été le coscénariste du film 120 battements par minute, l’autre est une spécialiste du surréalisme et de Sade. Leur échange est une invitation à ne pas succomber au poids de la société.

Philippe Mangeot [avant même que nous ayons posé une question !] : Annie, je voudrais vous faire une déclaration. Sans vous connaître personnellement, je vous ai croisée à plusieurs reprises au fil de mes histoires d’amour. La première fois, parce qu’un homme que j’aimais passionnément m’a offert votre essai sur Sade, Soudain, un bloc d’abîme, à sa sortie en 1986. Ce n’était pas rien, un tel cadeau, de la part d’un amant en ces temps-là ! La seconde fois, parce que j’ai rencontré il y a sept mois un jeune homme dans le métro, que j’en suis tombé amoureux et qu’il m’a envoyé un extrait d’un entretien télévisé, dans lequel vous expliquez que, parfois, le monde répond à l’immensité du désir. Vous avez donc illuminé, sans le savoir, ma vie amoureuse.

 

Annie Le Brun : Alors, je n’ai peut-être pas tout raté !

 

À propos de l’amour, Philippe Mangeot, vous est-il arrivé de vous poser ces deux questions, liées à l’épidémie du sida mais aussi à la condition humaine : « Est-ce que j’aime l’autre parce qu’il va mourir ? Est-ce que je l’aime parce que je vais mourir ? »

P. M. : Je me suis posé ces questions parce que j’étais amoureux de quelqu’un qui était très malade. C’est une expérience vertigineuse. Celle d’un amour sans avenir et sans projection, d’un amour vécu dans l’urgence, le sentiment constant de la dernière fois, la pression de la responsabilité. Je ne saurais jamais si cet amour-là était plus fort ou plus impur que les autres. Ces questions sans réponse me renvoient à un abîme. Mais je crois que, depuis, elles ont continué d’orienter ma vie amoureuse et ma vie tout court. J’avais 20 ans en 1985, j’étais séropositif et je me suis découvert mortel, longtemps sans doute avant mes propres parents, à un âge où devraient l’emporter la croyance heureuse ou la folle fiction de l’immortalité.

 

A. L. B. : La découverte du corps mortel, c’est la découverte du corps unique et irremplaçable. C’est la révélation tremblée et bouleversante de la façon dont vulnérabilité et singularité se confondent. Celui que j’aime est unique, mais ce n’est pas une qualité ab­straite ou métaphysique, au contraire : le merveilleux de l’amour est de donner à l’unique un enracinement physique.

 

P. M. : On ne pourrait peut-être pas aimer un être immortel. En même temps, si j’ai rejoint Act Up, c’est aussi parce que je n’aimais pas le discours qui a accompagné le surgissement du sida et qui croyait y retrouver l’éternelle alliance d’Éros et de Thanatos. J’y voyais une tentative de neutralisation de la nouveauté de cette catastrophe. Or on ne peut pas être à la hauteur d’un événement en entonnant une vieille chanson ! Pour nous qui étions malades, la mort était là, autour de nous, proche de nous, et pourtant elle n’était dépositaire d’aucun sens. Nous nous découvrions précaires et fragiles, mais rien ne se jouait là-dedans en termes de vérité. Nous vivions et nous aimions dans la con­science de la mort, mais nous refusions de nous laisser définir par elle.

 

A. L. B. : Exactement, il s’agit de ne pas se laisser amoindrir.

 

P. M. : D’inventer d’autres formes de vitalité.

 

“L’espoir vient des gens qui prennent leurs désirs pour des réalités, à n’importe quel âge”

Annie Le Brun

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Article issu du magazine n°140 juin 2020 Lire en ligne
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