Frédéric Gros : “Pour Foucault, c’est l’État qui institue les individus, et non plus les individus qui renoncent à leur liberté pour instituer l’État”
Michel Foucault est mort il y a quarante ans cette année. Nous avons demandé au philosophe Frédéric Gros de préfacer des extraits de Naissance de la biopolitique. Cours au Collège de France 1978-1979 (à retrouver dans le cahier central de notre numéro), qui marquent le moment où l’auteur de Surveiller et Punir infléchit ses analyses sur les institutions disciplinaires pour penser les rapports de pouvoir à l’échelle des États.
« Pour comprendre où en est Michel Foucault de ses recherches sur les rapports de pouvoir en 1979-1980, il faut se souvenir de cette espèce d’inflexion décisive qu’il donne à ses recherches en 1976, quand il dit en substance dans son cours “Il faut défendre la société” : au fond, j’en ai un peu assez de mes micro-analyses sur le pouvoir disciplinaire dans les hôpitaux, les écoles, les usines, etc. Bien sûr, c’est tout à fait décisif de montrer que le rapport médical aux fous, le rapport pédagogique aux enfants sont des rapports de pouvoir, et pas seulement – ou même pas du tout ! – du savoir nourri par de la sollicitude. Mais il faudrait maintenant changer d’échelle et voir si le type d’analyse proposé peut valoir aussi pour le gouvernement de ses sujets par un État, la gestion d’une population. C’est alors que Foucault articule au moins trois grands modèles de ce qu’il nomme “gouvernementalité”. La première est la gouvernementalité “par la vérité”, soit la vieille idée que la connaissance des lois du monde doit présider aux décisions d’une autorité sage. La deuxième est la gouvernementalité de la “raison d’État”, par laquelle l’État se réfléchit comme un individu souverain qui prend ses décisions en donnant la priorité à la défense de ses intérêts supérieurs. Et la dernière, la gouvernementalité “libérale”, repose sur la rationalité supposée des gouvernés dans la poursuite de leurs intérêts, qui sert alors de règle aux politiques publiques.
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