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Regarde-la bien en face

Françoise Dastur, propos recueillis par Catherine Portevin publié le 24 octobre 2017 5 min

Si André Comte-Sponville se réfère à Épicure, pour qui « la mort n’est rien », Françoise Dastur est une spécialiste de Heidegger, qui définit l’homme comme un « être-pour-la-mort ». Pourtant, en chemin, chacun nuance sa position.

 

André Comte-Sponville / Vivre en dépit de la pensée de la mort

Épicure a raison de dire que la mort n’est rien pour les morts, mais il a tort d’ajouter qu’elle n’est rien pour les vivants. Nous savons que nous mourrons ; et ce savoir, ce n’est pas rien.

Spinoza a raison de dire que la sagesse est « méditation de la vie, non de la mort ». Mais tort de prétendre que « l’homme libre ne pense à rien moins qu’à la mort ». La formule est doublement contradictoire : d’abord parce qu’il faut penser à la mort, plus qu’à bien d’autres choses, pour pouvoir conclure qu’il convient de n’y penser pas ; ensuite parce que méditer la vie, c’est aussi penser sa finitude, donc le néant qui la clôt.

Puis il y a la mort des autres, et spécialement de nos proches… Il convient de n’en pas exagérer, ni sous-estimer, l’importance. Mon expérience me confirme qu’on s’en console le plus souvent facilement, voire allègrement, mais point toujours. Deux de celles que j’ai dû affronter – le suicide de ma mère, la mort de ma fille – m’ont brisé le cœur. D’autres, que je redoute depuis des années, m’effraient bien plus que la mienne. Comment pourrais-je n’y penser pas ? Tout est éternel, sans doute ; mais rien n’est définitif que la mort. Et c’est ce définitif, lorsqu’on perd un être cher, qui est le plus atroce.

« Ni une vie sans fin ni une vie finie ne peuvent nous satisfaire ! »

Pour le reste, je soupçonne que le rapport à la mort, pour chacun, soit moins affaire de doctrine que de tempérament. Pour ma part, j’y pense tous les jours, sans angoisse le plus souvent (du moins s’agissant de ma mort à moi), sans impatience, sans colère, non toutefois sans un peu de tristesse ou de mélancolie, comme une nostalgie anticipée. Reconnaissons-le : mourir, on préférerait pas ! Parce qu’on souhaite l’immortalité ? Justement pas, en tout cas pour ce qui me concerne (mais plusieurs de mes amis me disent ressentir la même chose). C’est le plus étonnant peut-être : que ni une vie sans fin ni une vie finie ne puissent nous satisfaire ! Celle-là, parce qu’on s’en lasserait ; celle-ci, parce qu’elle ne nous suffit pas, parce que la perspective de la mort ne cesse dès lors de nous accompagner, pas après pas, comme l’ombre portée du périr, dans la clairière de vivre, comme un arrière-goût d’amertume ou de néant qui vient relever ou corrompre – cela dépend des moments – nos plaisirs les plus doux. Question de durée ? Après tout peut-être, pour une part. Trente mille ans, ce serait trop long. Soixante-cinq ans (mon âge), ce serait trop court. Alors quoi ? Deux ou trois siècles ? Cela viendra peut-être, pour nos arrière-petits-enfants, mais chacun se doute bien qu’il en voudrait, s’il parvenait à ce terme en bonne santé, encore un peu plus… C’est le piège de la finitude : d’être perpétuellement hantée du néant de tout ce qu’elle n’a pas, qu’elle n’est pas, et qui lui manque… Quand bien même nous ne mourrions jamais, cette finitude-là n’en resterait pas moins notre lot, définitivement, donc aussi l’échec, la déception, le tragique : nous serions voués à l’insatisfaction, comme aujourd’hui, mais à perpétuité ! Contre quoi l’idée de la mort a au moins ce mérite de nous ramener à l’essentiel, qui n’est pas la poursuite indéfinie de l’avenir mais l’ouverture au présent – non l’attente mais l’attention, non le possible mais le réel, non la réussite mais l’action !

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