Richard David Precht : “Les décisions rationnelles ne sont pas l’alpha et l’omega de la sagesse”
« Dans le cas où la crise du Covid évoluerait vers une crise économique prolongée, il faut s’attendre à ce qu’au sein des professions automatisables, de nombreuses pertes d’emploi deviennent permanentes » : tel est l’avertissement des économistes de la Federal Reserve Bank de Philadelphie Lei Ding et Julieth Saenz Molina, qui viennent de publier une étude sur « l’automation forcée » du monde du travail dans le sillage de la pandémie mondiale. Des luddites briseurs d’engins aux polémiques sur les caisses automatiques, la crainte que la multiplication des machines ne mette au chômage un nombre toujours croissant de salariés n’est pas nouvelle. Elle s’accentue cependant à l’heure du tournant digital de l’économie. Faut-il nous en inquiéter ?
Pas nécessairement, affirme le philosophe allemand Richard David Precht, auteur du best-seller Qui suis-je, et si je suis, combien ? (Belfond, 2010, pour la traduction française) qui vient de faire paraître Künstliche Intelligenz und der Sinn des Lebens (Goldmann, 2020, « L’intelligence artificielle et le sens de la vie », non traduit). À condition d’accompagner politiquement cette réduction globale de la quantité de travail.
Opposé aux prophètes de malheur comme aux technoptimistes patentés, l’essayiste allemand aborde de front les ambivalences des mutations du monde du travail : la digitalisation et l’automatisation possèdent des avantages indéniables, mais posent aussi de nombreux problèmes dont nous devons avoir conscience pour un débat démocratique sain.
Pour l’automation
- L’automa(tisa)tion libère l’homme d’une grande partie des tâches pénibles – physiquement éprouvantes ou répétitives – qu’il devait effectuer par le passé.
- Si elle détruit des emplois, l’automatisation en crée aussi de nombreux autres, ne serait-ce que parce que les machines auront sans doute toujours besoin des hommes pour être entretenues ou réparées. Analystes de données collectées par l’IA, pilotes de drones, ingénieurs spécialistes de la réalité virtuelle… Autant de postes à pourvoir.
- Notre vie ne se résume pas au travail : plutôt que de regretter la diminution de la quantité de travail salarié disponible, nous devons nous réjouir du temps libre supplémentaire dont nous allons pouvoir bénéficier afin de développer d’autres aspects de notre personnalité : notre « vie intérieure ».
Contre l’automation
- Les nouvelles technologies nous dispensent de certaines tâches pénibles. Mais elles sapent, aussi, ce qui fait pour beaucoup de travailleurs l’intérêt de leur emploi : la présence physique, incarnée, dans un tissu de relations sociales.
Intelligence artificielle, voitures autonomes, identité du travailleur, financement des retraites, responsabilité morale, réforme éducative,…
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