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Songes et métamorphoses © Élisabeth Carecchio

Arts / Théâtre

“Songes et Métamorphoses” : quand l’imagination recompose le monde

Cédric Enjalbert publié le 16 mai 2017 3 min
En réunissant au théâtre les “Métamorphoses” d’Ovide et “Le Songe d’une nuit d’été”, de William Shakespeare, le metteur en scène Guillaume Vincent met l’imagination au pouvoir. Il démontre que cette puissance n’invente pas le monde ni s’en éloigne, mais qu’elle le recompose pour mieux le retrouver. À voir à l’Odéon-Théâtre de l’Europe (Paris) et en tournée en France.

« On veut toujours que l’imagination soit la faculté de former des images, écrit Bachelard. Or elle est plutôt la faculté de déformer les images, elle est surtout la faculté de nous libérer des images premières, de changer les images. » Pour preuve, le remarquable spectacle réalisé par le metteur en scène Guillaume Vincent à l’Odéon-Théâtre de l’Europe : Songes et Métamorphoses, d’après Ovide et Shakespeare. Il adapte cinq métamorphoses du premier en guise de préambule au Songe d’une nuit d’été. Un fil rouge relie ces deux volets : une foi partagée dans la capacité de l’imagination à rendre compte de la réalité, permettant par le détour de la fiction le retour au monde d’ici. Que disent Narcisse, Hermaphrodite, Myrrha, Pygmalion ou Procné, et leurs métamorphoses qui forment l’horizon mythique de l’Occident ? Jouant des ambivalences et de l’illusion, tout en se gardant des malentendus, ces récits montrent que l’imagination n’invente pas un monde mais qu’elle le déforme et le recompose pour le dire mieux.


 

Comme l’écrit Charles Delattre, enseignant la littérature et civilisation grecques à l’université et à Sciences-Po : 

« les formes suscitent un désir qui peut être mortifère. La seule issue est alors de dépasser la forme (morphè) pour atteindre l’idée (idea) – ce qui permettrait d’échapper à la tyrannie du désir. À condition de se laisser guider par la philosophie. Voilà ce que proposait le Socrate de Platon pour maîtriser le maléfice des apparences et du désir. Mais, avec Ovide, la notion même d’idée derrière la forme est devenue inaccessible. La métamorphose est la seule possibilité pour la forme d’évoluer. Narcisse est une petite pièce d’un immense puzzle qui n’est plus philosophique mais poétique et politique. »


Dialectique des regards

À sa façon, Guillaume Vincent reconstitue une partie de ce puzzle, avec Shakespeare. Il met à l’épreuve l’importance de l’altérite du regard dans la construction de soi et du monde. Selon Charles Delatre, notamment auteur de Mythe et Fiction (Presses universitaires de Paris Ouest, 2010) : 

« c’est précisément la position très dangereuse qu’occupe Narcisse, il voit son image mais il voit aussi son propre œil en train de la voir. C’est un dispositif que l’on trouve avec Méduse ou avec le mauvais œil : l’œil est un agent agressif et lorsque vous croisez quelqu’un qui a le mauvais œil, il faut absolument détourner son regard ou utiliser une amulette en forme d’œil qui va être un contre-œil. Il faut éviter que les regards ne se rencontrent. Car l’“entrechocs” des regards risque de produire un court-circuit qui fige les personnages. C’est ce que peuvent dire les mythes de Méduse et de Narcisse : le personnage est pétrifié par la neutralisation des regards. Alors qu’on regarde l’altérité absolue en regardant Méduse, là Narcisse regarde le contraire de l’altérité absolue, l’identité absolue. Mais ce sont les deux pôles d’une même dialectique. »

Par une suite de mises en abîmes, enchâssant les spectacles dans son spectacle, Guillaume Vincent donne forme à cette dialectique des regards, partagée entre identité et altérité, réalité et fiction, sans jamais rien figer. Car le rythme ne manque pas, ni les effets spectaculaires : une pluie de paillettes dorées, des costumes fantaisistes, des effets de lumières portés sur des scènes « flottantes », qui avancent et reculent sur la scène principale. Ces artifices sont d’autant plus plaisants au théâtre qu’ils n’ont rien de factices ; au contraire, ils nourrissent notre « expérience sensible » à laquelle l’imagination donne sens et sur laquelle repose finalement notre activité de pensée. Aidé par une distribution nombreuse dont se démarque l’extraordinaire comédienne Émilie Incerti Formentini (repérée dans Rendez-vous Gare de l’Est) Guillaume Vincent gagne progressivement la bienveillance des « gentils spectateurs ». Ingénieusement mais sans pédanterie, il démontre en un peu plus de temps qu’il n’en faut (le spectacle aurait gagné à davantage de concision), la puissance de l’illusion et les merveilles de l’imagination, si nécessaires à la vitalité de la pensée. 

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