Laurence Devillairs : le reconfinement, le désir, l’essentiel… et les librairies
En situation d’urgence sanitaire, le politique semble se réduire à un seul acte : la prise de décision. Elle prime sur la négociation et devrait l’emporter sur le jeu de la controverse pour la controverse. La vie en période de reconfinement va de nouveau se concentrer sur un petit nombre de routines : télétravail, accompagnement des enfants à l’école et sorties du chien.
La ligne droite des habitudes. Une vie unidimensionnelle faite de besoins vitaux et de déplacements prioritaires. Un mode d’être finalement assez stoïcien, sans les bifurcations ni les détours, ces dépenses d’énergie, souvent à perte, auxquelles nous conduisent les passions et les désirs de l’impossible : faire que le présent ne soit pas ce qu’il est, que je vive ailleurs qu’à Paris, que mon passé soit différent, etc.
La vie confinée ou reconfinée n’est pas de la survie mais elle en a l’aridité et la rectilignité : tout droit et chez soi. On a cru, pendant le confinement du printemps, que ces restrictions d’horizon nous obligeraient à une vie plus intérieure, où l’on prendrait le temps d’écouter un peu plus cette mélodie bien à nous de nos mille et une pensées et émotions.
Ce sont ces « petites perceptions » comme les nomme Leibniz, cette inquiétude fondamentale qui fait que nous ne sommes jamais totalement satisfaits, statiques et rassasiés, mais que, toujours, nous sommes absorbés par quelque faim nouvelle, quelque soif inaperçue. C’est cette « démangeaison » continuelle qui fait de nous des êtres de désir.
De désirs, et pas seulement de besoins. La période est pourtant à la confusion entre les deux : s’ils sont prioritaires, les besoins ne sont pas essentiels, et s’ils sont parfois vains, les désirs sont toutefois essentiels. Santé, sécurité sont des priorités. Manger, boire et dormir sont des besoins. Mais l’essentiel est ailleurs, il est d’un autre ordre. Le monde des besoins est un monde fini, où une envie trouve satisfaction, où une case est cochée : manger, fait ; bouger, fait.
Rien à voir avec l’univers infini des désirs, où le but est de désirer encore. On se raconte toujours des histoires quand on désire. Ce qui nous agite alors, ce n’est pas la réalité, mais la fiction et les rêves, l’espoir et les idées. Tout désir est en cela désir de l’impossible, d’une vie plus intense, plus dramatique. Une vie comme on en lit dans les livres. Sans eux, pas de désirs. Les livres sont des objets du désir : ils mettent plus de vie dans la vie, la transporte plus haut et plus loin que le simple ici et maintenant des besoins. Alors, oui, les librairies sont des commerces essentiels. C’est une erreur politique de les fermer, c’est une faute morale d’en interdire l’accès. Il faut cet essentiel en poche pour que la vie soit un peu supportable.
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