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À Miami, en Floride, un préposé aux scrutins relève les bulletins dans une boîte électorale recueillant les votes par correspondance, le 3 novembre 2020. © Eva Marie Uzcategui/AFP

Élections américaines

Donald Trump contre le vote par correspondance : une tentation fasciste ? 

Michel Eltchaninoff publié le 05 novembre 2020 3 min

Donald Trump, en accusant les démocrates de fraudes aux élections présidentielles, tente de faire fonctionner le piège qu’il a tendu à ses concurrents : celui du vote par correspondance. Celui-ci a été plus massif que jamais, notamment à cause de la crainte du Covid-19. Or il joue plutôt en faveur des démocrates. Sachant que le dépouillement des votes par correspondance prend plus de temps que celui des votes « physiques », Donald Trump affirme la prééminence du vote en présence au vote à distance. Le président sortant sous-entend que les votes à distance sont le fait de personnes un peu lâches et paresseuses, répugnant à se déplacer, à être physiquement présentes au moment du vote. Lui-même a voté en personne ; il suggère ainsi que, contrairement à Joe Biden, il ne craint pas le contact, notamment lorsqu’il refuse de débattre avec lui par écrans interposés. Il vante la confrontation physique contre la politesse, la distance et l’évitement.

C’est toute une philosophie de la présence et de l’immédiateté qu’utilise Donald Trump. Examinons-la plus en détail.

 

• Un vote par correspondance étalé dans le temps peut représenter un problème démocratique. Si l’on étale trop la durée du vote, on risque de fausser le choix des électeurs – la situation d’un pays pouvant évoluer rapidement avant et après une tornade ou un attentat terroriste. Par contraste, Donald Trump incarne l’immédiateté, par exemple l’expression de ses humeurs dans des tweets spontanés, impulsifs et impatients. Lorsqu’il proclame sa victoire, il refuse d’attendre le dépouillement de tous les bulletins et privilégie une instantanéité qui nie la durée, pourtant indispensable à un processus électoral.

• La vitesse contre la lenteur. Cette apologie de la fulgurance instinctive est héritée du futurisme italien, qui prétend, au début du XXe siècle, remplacer la contemplation des chefs-d’œuvre du passé par l’exaltation de la vitesse moderne. L’un des grands théoriciens de ce mouvement est Filippo Tommaso Marinetti (1876-1944). Il célèbre dans divers manifestes « la beauté de la vitesse ». Alors que la lenteur est assimilée à des « prudences stagnantes », une attitude « passive et pacifiste », la vitesse est la « synthèse de tous les courages en action ». Donald Trump, lui aussi, privilégie ce qu’il voit comme un courage de la vitesse.

• La confrontation contre le consensus. Marinetti affectionne « le mouvement agressif, l’insomnie fiévreuse, le pas gymnastique, le saut périlleux, la gifle et le coup de poing. » Ce sont des manifestations d’énergie, qui entraînent logiquement des confrontations physiques et réelles. Il faut noter que Marinetti se ralliera au fascisme, adepte du coup de poing. Se rendre aux urnes, se manifester, ne pas craindre le Covid en mettant un masque, c’est manifester ce courage de l’affrontement auquel Donald Trump engage ses partisans. Cela signifie-t-il que Trump est un héritier de la pensée fasciste ? Il n’en a certes pas le bagage idéologique. Il n’a sans doute même pas de logiciel idéologique du tout. Mais son goût de l’immédiateté violente le rapproche de Marinetti.

• Le réel contre le virtuel. Refuser la médiation de la correspondance est enfin, aux yeux de Donald Trump, une ultime façon de critiquer les élites « hors sol » du parti démocrate à qui il a volé la victoire en 2016. Le paradoxe est qu’il utilise les outils virtuels, celui de la télévision et des réseaux sociaux, pour parler aux « vraies gens » qu’auraient oubliées les élites urbaines. Il veut leur redonner une voix, mais par les outils du virtuel, tout comme Marinetti faisait des nouveaux moyens de transport rapides – la voiture, le train – l’authentique voie d’accès à la vérité humaine et sociale.

• Le « pays réel » contre le « pays légal ». En prétendant incarner l’Amérique authentique contre la domination mondialisée du virtuel, Trump utilise la distinction faite au début du XXe siècle par le penseur nationaliste Charles Maurras entre le « pays réel » et « pays légal ». C’est d’ailleurs ce qui lui permet de s’élever contre les réalités du décompte électoral. En récusant les résultats des votes par correspondances, rejetés dans le camp du non-physique et de l’irréel, Donald Trump pourra, s’il perd, reprendre à son compte la formule de Maurras dans son Enquête sur la monarchie (1900) : « Il faudrait se garder de croire que ce souverain lui-même, ce maître du pays légal qui fait la majorité, exerce aucune souveraineté vraie. » 

 

Gageons que Trump continuera à vouloir représenter l’Amérique réelle contre l’Amérique « légale » de la présidence démocrate.

Trump reprend-il des motifs de la pensée fasciste ? Allons voir à la source.
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