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Jérôme Ferrari et Michaël Foessel © Philippe Matsas / Leextra / Leemage © Hannah Assouline / Opale / Leemage

 

Jérôme Ferrari / Michaël Foessel. Un appel d’air métaphysique

Jérôme Ferrari, propos recueillis par Alexandre Lacroix publié le 17 janvier 2013 15 min

Tant que nous volons à ras du présent, nous ne voyons aucun avenir devant nous et redoutons la catastrophe. Et s’il nous fallait ici prendre un peu de hauteur ? Tel est le pari du romancier, et prix Goncourt, Jérôme Ferrari, et du philosophe Michaël Foessel.

C’était une matinée d’hiver particulièrement froide et pluvieuse, le ciel était noir, la lumière du jour filtrait à peine entre les nuages. On n’aurait pu rêver mieux pour évoquer la fin du monde en compagnie du romancier Jérôme Ferrari et du philosophe Michaël Foessel. On s’y serait presque cru.

S’il y a une chose pouvant déstabiliser le lecteur qui ouvrirait pour la première fois un livre de ces jeunes auteurs, nés respectivement en 1968 et en 1974, c’est que tous deux semblent littéralement habités par les références chrétiennes, sans s’affirmer eux-mêmes croyants. Chez Jérôme Ferrari, ce sont les prêches prononcés par saint Augustin dans la cathédrale d’Hippone qui viennent hanter son dernier roman, Le Sermon sur la chute de Rome. Chez Michaël Foessel, dans le récent Après la fin du monde, on trouve une généalogie incroyablement précise de la notion d’Apocalypse, depuis saint Jean jusqu’à l’époque moderne. Pourquoi ce retour, dans une génération que rien n’y prédestinait, à des préoccupations métaphysiques et au vocabulaire de la transcendance ? Eh bien, justement, par refus d’un matérialisme omniprésent qui borne notre horizon. « Notre époque présente la caractéristique originale d’étaler un cynisme insupportable doublé d’un moralisme tout aussi insupportable », s’est énervé à un moment donné Jérôme Ferrari. Où l’on voit comment les vieilles catégories de la métaphysique – la notion de monde pour Michaël Foessel, celles d’âme et de temps pour Jérôme Ferrari –, qu’on croyait désuètes ou inutiles, permettent de relever la tête et de conjurer l’obsession du déclin.

 

Michaël Fœssel : Commençons par un constat. Une ambiance de fin du monde baigne notre époque. Nous sommes abreuvés d’images catastrophistes par les médias, le cinéma, mais aussi par la littérature. Le succès de La Route de Cormac McCarthy [L’Olivier, 2008], récit apocalyptique très noir, s’inscrit dans cette tendance. De même, le titre de votre roman, Le Sermon sur la chute de Rome, fait écho à ce sentiment partagé de décadence, et il n’est pas indifférent qu’il ait eu le prix Goncourt en 2012. D’où nous vient cette hantise ? Pourquoi le millénarisme fait-il retour dans le contexte séculier qui est le nôtre ? À mon sens, on peut identifier deux raisons principales. D’un côté, ce retour du catastrophisme est sensible dans des zones géographiques, Europe et États-Unis, qui se voient aujourd’hui confrontées à une perte d’influence. Tout se passe comme si la fin de ce monde où l’Occident menait la danse, tant sur le plan politique, économique, qu’idéologique, devait coïncider avec la fin du monde en général. Nous projetons notre récession sur l’ordre planétaire, à un moment charnière de l’Histoire où nous sommes encore incapables d’imaginer quel nouvel équilibre sortira des transferts de puissance actuels vers la Chine et les pays émergents. Paradoxalement, la « mondialisation » marque aussi la fin d’un monde. Pour faire une boutade, je ne suis pas sûr qu’au Mexique, on se passionne autant qu’ici à Paris pour le calendrier maya annonçant l’Apocalypse pour le 21 décembre dernier… Mais il y a une seconde raison à ce pessimisme ambiant. Dans les premiers siècles du christianisme, à l’époque de saint Augustin par exemple, la fin du monde était une prophétie religieuse, un article de foi. Aujourd’hui, c’est devenu un pronostic rationnel. Compte tenu de la puissance que les hommes se sont accaparée, de la menace du nucléaire ou du réchauffement climatique, de la limitation des ressources naturelles, il est raisonnable de penser que nous allons dans le mur. De façon éloquente, ce sont les experts scientifiques qui tiennent lieu aujourd’hui de prophètes de malheur, dans un jeu à fronts renversés où la science a pris le rôle de la religion. Tout ceci crée une atmosphère de déclin civilisationnel, de mélancolie, doublée d’une prise de conscience de la finitude de l’aventure humaine.

 

Jérôme Ferrari : Les deux explications que vous avez invoquées ne jouent pas sur le même plan. Ce n’est évidemment pas la même chose de dire que l’Apocalypse est devenue une perspective rationnelle – nous n’avons plus besoin d’imaginer qu’une trompette va retentir et que les cieux vont s’ouvrir, nous savons désormais qu’il y a d’autres possibilités pour le finale –, ou encore de se sentir, en tant qu’Occidental, menacé par le déclin de notre domination mondiale. Cependant, je pense que nous autres Occidentaux sommes amenés, par notre perte d’influence, à souhaiter presque inconsciemment qu’une catastrophe globale se produise. Avec égoïsme, nous espérons presque qu’il n’y aura pas d’Histoire sans nous.

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