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Le livre du jour

“Comment parler des faits qui ne se sont pas produits ?”, de Pierre Bayard

Frédéric Manzini publié le 09 décembre 2020 3 min

Pierre Bayard s’est fait connaître auprès du grand public avec un ouvrage au titre délicieusement provocateur : Comment parler des livres que l’on n’a pas lus ? (Minuit, 2007), et avait récidivé avec Comment parler des lieux où l’on n’a pas été ? (Minuit, 2012), qui prolongeait l’enquête sur les situations où nous devons parler de ce que nous ne connaissons pas, ou que nous connaissons mal. La trilogie s’achève aujourd’hui avec Comment parler des faits qui ne se sont pas produits ? (Minuit, 2020) qui recense et analyse certains récits d’évènements inventés par leurs auteurs, mais que ceux-ci présentent pourtant comme bien réels. Qu’il s’agisse de Chateaubriand racontant sa rencontre avec Washington ou d’Anaïs Nin multipliant les subterfuges de plus en plus sophistiqués pour pouvoir mener sa double vie sans éveiller le soupçon, on se prend à sourire à ces affabulations moins insignifiantes qu’elles y paraissent. Et si la force de la fiction, parce qu’elle décomplexe notre rapport crispé à l’exactitude des faits, était de nous sauver de notre obsession pour la véracité à tout prix ?

 

  • Les Fabulateurs... À notre époque guettée par les fake news, la vigilance et le souci de la vérité des faits semblent plus que jamais de mise. C’est pourtant avec une évidente tendresse que l’ouvrage de Pierre Bayard s’intéresse à ceux qu’il appelle des « fabulateurs » : ceux qui inventent des histoires qui ne sont jamais réalisées, ou qui racontent des faits tout droit sortis de leur imagination. De bonne foi ou pas, par fantasme ou par jeu, Misha Defonseca a ainsi raconté son « incroyable » épopée en pleine Shoah dans Survivre avec les loups (1997) tandis que Freud s’est imaginé un Léonard de Vinci à la vie sexuelle frustrée pour les besoins de sa propre interprétation. Les écrivains ne sont pas les seuls en cause, puisqu’une place est également réservée aux « légendes urbaines » qui sont relayées sans être vérifiées, mais ils occupent la place principale – puisque la littérature abonde en fictions de toutes sortes. 
  • … et les Chicaneurs. Au génie du « fabulateur », Pierre Bayard oppose la mesquinerie de celui qu’il appelle avec humour le « chicaneur », à savoir celui qui « ne cess[e] de vérifier de manière obsessionnelle, à la limite du harcèlement, la moindre de ses affirmations. » Et Pierre Bayard de nous mettre en garde contre son pouvoir de nuisance : « Chacun en connaît dans son entourage et sait les ravages que ce rabat-joie est capable de faire en quelques minutes en matière d’ambiance. » Pourquoi, en effet, gâcher le plaisir d’une belle histoire sous le prétexte – fallacieux ? – qu’elle ne s’est pas réalisée ? Après tout, les mythes de l’Antiquité ou les histoires du soir qu’on raconte aux enfants se situent en dehors de la dichotomie du vrai et du faux.
  • Une « vérité subjective ». À les étudier de près, il ressort surtout que les récits inventés ne font pas que nous charmer : ils sont riches d’enseignements. Ils nous rappellent d’abord que la frontière entre la vérité et la fausseté n’est pas toujours nette, comme est souvent floue la limite entre la fiction et la réalité. Comme l’écrit Pierre Bayard à propos du journal intime d’Anaïs Nin, « il serait abusif d’opposer la vie privée de Nin, perçue comme l’espace de la falsification, au journal, présenté comme le lieu du parler vrai. Car celui-ci est en réalité l’objet d’une construction permanente. » À côté de la vérité objective qui correspond aux faits tels que n’importe qui peut les établir, il y aurait ainsi une « vérité subjective », personnelle et insubstituable, qui dit la réalité intime de celui qui les raconte, et qui interroge notre préjugé d’une vérité qui serait nécessairement objective, universelle et univoque.
  • Une éducation par la fiction ? Au lieu de se cramponner à la vérité, de dénoncer les menteurs et de chercher en permanence à démêler le vrai du faux, Pierre Bayard nous invite plutôt à prendre toute la mesure de la « fécondité du faux ». Non seulement les histoires fallacieuses possèdent « une part de vérité », mais elles nous rendent plus intelligents car elles éveillent librement notre esprit critique et nous aguerrissent devant ceux qui voudraient nous tromper pour servir leurs propres intérêts. La création littéraire, meilleure arme pour nous immuniser contre la manipulation ? Lisez notre entretien avec Pierre Bayard.

 

Comment parler des faits qui ne se sont pas produits ?, de Pierre Bayard, vient de paraître aux Éditions de Minuit. Disponible ici.

Comment lire un entretien qu’on n’a pas lu ? En cliquant ici !
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