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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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Liège (Belgique), le 15 juillet 2021. Une habitante tente de s’extirper d’une rue inondée après plusieurs jours de pluies torrentielles. © Bruno Fahy/Belga/AFP

Environnement

Bienvenue dans l’ère de l’apocalypse climatique

Pierre Terraz publié le 16 juillet 2021 3 min

« L’apocalypse climatique » : c’est ainsi que désignent désormais de nombreux scientifiques l’époque à laquelle nous vivons. Pour cause, les températures record avoisinant les 50°C au Canada et aux États-Unis ces dernières semaines seraient à l’origine de milliers de morts, ainsi que d’une dizaine d’incendies dévastateurs. Et les inondations mortelles en cours, en Allemagne et en Belgique, se font le signe d’une profonde déstabilisation du climat même en « zone tempérée » : comme si les catastrophes naturelles, en lien avec le réchauffement climatique, étaient en train de devenir la norme.

Si l’expression interroge, c’est bien parce que le terme d’« apocalypse » a quelque chose de prophétique et rime avec « fin du monde ». Alors, qu’essayent de nous dire les scientifiques ? Qu’il serait déjà trop tard ? Ou bien, qu’à la manière du philosophe Jean-Pierre Dupuy dans Pour un catastrophisme éclairé (Seuil, 2002), il est temps de prendre l’inimaginable pour réel ?

L’inimaginable…

Inimaginable. C’est bien le terme qui convient pour qualifier le déferlement de chaleur qu’a subi l’Amérique du Nord ces dernières semaines. En atteste la déclaration de Geert Jan van Oldenborgh au magazine Science News : selon le climatologue néerlandais, aucune étude scientifique n’avait prévu l’arrivée de telles températures, même en prenant en compte les effets délétères du dérèglement climatique. Dans la plupart des régions en effet, les records historiques de chaleur ont été battus de 5°C, soit largement plus ce que prévoyaient la plupart des simulations. « C’était un événement extraordinaire : aucun mot existant ne peut le décrire », a notamment expliqué le spécialiste.

Indicibles, les conséquences de cette extrême chaleur le sont particulièrement dans les océans, rappelant l’importance fondamentale de l’eau sur une « planète bleue » qui en est recouverte à 75%. « Les animaux aquatiques bouillent dans leurs coquilles, et les fruits cuisent dans les arbres », écrivait la chroniqueuse Rebecca Solnit dans les colonnes du Guardian il y a quelques jours. L’image, forte, semblerait presque irréelle, mais témoigne de la simple vérité : sur les plages à marée basse, des odeurs pestilentielles d’invertébrés et de coquillages cuits (par milliards) prennent aux tripes. Un scénario digne de la fiction, dont l’apocalypse est normalement l’objet fantasmé.

… au service de l’anticipation

Voilà sans doute le coeur du problème, mais peut-être aussi sa solution : ce qu’on pensait ne pouvoir imaginer que dans des livres ou des films – « l’apocalypse » – se produit outre-Atlantique pour de vrai. Or, n’est-ce pas là le meilleur moyen de voir le réchauffement climatique, plus que de le simuler ou le calculer, et d’en sentir le poids réel ?

Étymologiquement d’abord, dans le judaïsme et le christianisme ancien, le terme d’« apocalypse » a ce double sens de « catastrophe » et de « révélation ». Or plus que jamais, c’est précisément aujourd’hui que ce double sens opère : à travers la catastrophe se profilant plus rapidement que les estimations scientifiques l’avaient imaginé, notre condition précaire se révèle soudainement à nous. Et ce n’est que dans la vision du presque-trop-tard que nous prenons conscience de l’impératif qui nous incombe.

« Le temps des catastrophes, c’est cette temporalité en quelque sorte inversée. La catastrophe, comme événement surgissant du néant, ne devient possible qu’en se ‘possibilisant’ […] C’est bien là la source de notre problème. Car s’il faut prévenir la catastrophe, on a besoin de croire en sa possibilité avant qu’elle ne se produise. Si, inversement, on réussit à la prévenir, sa non-réalisation la maintient dans le domaine de l’impossible », écrit Jean-Pierre Dupuy dans son ouvrage Pour un catastrophisme éclairé. Quand l’impossible est certain. Ainsi définit-il le concept de « catastrophisme éclairé ». Pour le philosophe, la catastrophe ne doit être pensée ni comme inéluctable, ni comme impossible. Les collapsologues, qui voudraient voir dans l’effondrement un fatalisme, alarment plus qu’ils ne préviennent et poussent finalement à l’inaction face à un destin de toute façon déjà tracé. Au contraire, la catastrophe rendue possible mais pas inexorable nous placerait face à notre condition, pour tenter de nous sauver. Loin des discours affabulateurs, qui donneraient presque crédit aux climatosceptiques, la simple possibilité d’une apocalypse éveillerait brutalement les consciences, dès les premiers symptômes.

C’est pourquoi les derniers phénomènes, aussi extraordinaires puissent-ils paraître, doivent rentrer dans le champ du réel pour nous sensibiliser à l’urgence climatique. Désormais, il n’est plus nécessaire pour constater le « changement » de regarder courbes et graphiques : il suffit de lever la tête ou de regarder à ses pieds, de cueillir un fruit ou de ramasser une huître. C’est sans doute là notre tragédie, mais aussi notre meilleure chance d’agir enfin.

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Comment résister à la paraphrase ?
« Éviter la paraphrase » : combien de fois avez-vous lu ou entendu cette phrase en cours de philo ? Sauf que ça ne s’improvise pas : encore faut-il apprendre à la reconnaître, à comprendre pourquoi elle apparaît et comment y résister ! 
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