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André Comte-Sponville, le 9 décembre 2020. © Luc Nobout/IP3/Maxppp

Société / Fin de vie

André Comte-Sponville : “La dépénalisation de l’euthanasie n’est pas une question de dignité mais de liberté”

André Comte-Sponville, propos recueillis par Martin Legros publié le 29 avril 2021 3 min

Alors que l’Assemblée nationale débat pour la première fois d’une proposition de loi visant à dépénaliser l’euthanasie, le philosophe André Comte-Sponville explique pourquoi il est favorable à cette mesure. Il répond également à ceux, dont Michel Houellebecq, qui y voient une menace pour la civilisation. 

 

Vous défendez depuis longtemps l’euthanasie. Pourquoi estimez-vous qu’elle devrait être légalisée ?

André Comte-Sponville : Le droit de mourir lorsqu’on le veut fait partie, selon moi, des droits de l’homme, a fortiori quand on souffre atrocement d’une maladie incurable ou d’un handicap écrasant. En France, le suicide n’est pas un délit. Pourquoi l’assistance au suicide en serait-elle un ? Or, s’agissant de l’euthanasie volontaire (demandée par le patient, directement ou par l’intermédiaire d’une personne qu’il a désignée), c’est bien de cela qu’il s’agit : d’une assistance médicale au suicide.

 

La loi Leonetti de 2005 autorise à cesser les traitements ou à délivrer un traitement dont l’effet secondaire est d’abréger la vie pour les patients en fin de vie souffrant d’une maladie incurable. Pourquoi ne suffit-elle pas ?

Prenons l’exemple de Vincent Humbert : 20 ans, paralysé des quatre membres, aveugle et muet, à la suite d’un accident. Il n’était pas en fin de vie et n’aurait donc pas relevé de la loi Leonetti. S’il avait voulu vivre, il est évident qu’il fallait l’y aider. Mais il voulait mourir, et sa mère l’y a aidé. S’il avait été l’un de mes fils, j’aurais fait pareil, et je trouve inadmissible qu’il faille pour cela violer les lois de la République.

 

Dans une tribune publiée dans Le Figaro, Michel Houellebecq dénonce la référence à la « dignité » au sens de Kant invoquée par les défenseurs de l’euthanasie. Ils laisseraient entendre que ceux qui veulent continuer à vivre dans ces conditions ne seraient pas « dignes »… Que pensez-vous de cette critique ?

Elle est justifiée, et on n’a pas besoin, pour en tomber d’accord, d’être kantien (ce que je ne suis pas) ! J’ai toujours dit que parler de « mourir dans la dignité » était maladroit. Si tous les êtres humains sont égaux en droits et en dignité, il est absolument exclu que cette dignité soit suspendue aux conditions de vie ou de mort. La dépénalisation de l’euthanasie n’est pas une question de dignité mais de liberté, face à sa propre vie ou à la souffrance. C’est pourquoi elle est si importante. La dignité ne dépend pas de nous. La liberté, si !

 

Les opposants à la dépénalisation s’inquiètent que les personnes en fin de vie en viennent à être considérées comme inutiles ou que la collectivité en vienne à considérer qu’elles coûtent trop cher…

Il y a là un réel danger, qui justifie de stricts garde-fous, que la loi devra déterminer. Mais cela ne saurait nous priver de la liberté ultime, qui est celle de mourir si on l’a décidé. Vous me direz qu’on n’a pas besoin de la loi pour mettre fin à ses jours. En temps ordinaire, en effet, quoique les moyens soient souvent effrayants (souvenez-vous de Deleuze se défenestrant), on peut techniquement le faire seul. Mais essayez de vous suicider dans un hôpital ou dans un Ehpad…

 

Dans sa tribune, Michel Houellebecq affirme qu’une civilisation qui légalise l’euthanasie « perd à ses yeux tout droit au respect » et qu’il deviendrait « légitime et même souhaitable de la détruire ». Que lui répondez-vous ? 

Personne, fût-il un écrivain de talent, ne peut décider de la dignité de tel ou tel, a fortiori d’une civilisation ! Qui peut prétendre que les sociétés suisse, néerlandaise, belge ou espagnole – qui autorisent l’aide active à mourir – n’ont plus droit au respect ? Invoquer l’avenir de notre civilisation face à tant de situations tragiques, c’est à la fois exagéré et dérisoire. Les philosophes de l’Antiquité reconnaissaient presque tous qu’il y a des cas où le suicide et l’assistance au suicide sont justifiés. Montaigne leur donne raison, comme Francis Bacon, David Hume et bien des philosophes et des écrivains d’aujourd’hui. Michel Houellebecq a bien sûr le droit de les désapprouver, pas de leur manquer de respect. La meilleure façon de défendre notre civilisation, c’est de débattre sans mépriser ses contradicteurs.

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