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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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Le président des États-Unis Joe Biden lors du sommet des dirigeants du G20, dimanche 31 octobre 2021, à Rome. © AP Photo/Evan Vucci/Sipa

Analyse

Joe Biden, l’heure du premier bilan

Jean-Marie Pottier publié le 04 novembre 2021 5 min

Le 7 novembre, cela fera un an que Joe Biden est officiellement président des États-Unis. Quel premier bilan peut-on dresser de son mandat, à la fois dans la gestion des principaux dossiers (crise sanitaire, climat, Afghanistan...) et dans sa manière d'exercer le pouvoir ? Petit tour d'horizon de ce qu'en pensent des intellectuels américains, sous forme de revue de presse.

Ce qui frappe, dans un premier temps, c’est la relative modestie rhétorique des commentaires exprimés depuis dix mois. Question de proximité politique, peut-être ; sans doute de style de gouvernement, aussi. Joe Biden, contrairement à Donald Trump, n’invite pas à l’hyperbole et reste soigneusement à l’écart des culture wars qui scandent le quotidien de l’Amérique. Il faut se tourner vers Cornel West, l’un des principaux philosophes afro-américains, échaudé par l’implication du nouveau président dans la politique d’incarcération de masse des années 1990, pour trouver des mots qui blessent : « Quand j’entends Biden et sœurette Harris (sic) dire que l’Amérique n’est pas raciste, j’ai juste envie de leur dire d’arrêter le crack », clamait-il en juillet. Ce partisan de Bernie Sanders a notamment soutenu, lors d’une élection primaire dans l’Ohio, une candidate (finalement battue) qui avait tenu des propos orduriers sur Biden : « Quand nous sommes en désaccord, il faut le dire avec franchise, s’est-il justifié. Et parfois, quand vous êtes franc, surprise, le langage peut tourner à l’hyperbole. »

Rupture avec la fascination méritocratique

Sur le fond, les principales critiques, après quelques mois de relatif état de grâce, ont porté sur le moment le plus périlleux de la présidence Biden jusqu’à présent : le retrait d’Afghanistan. Théoricien dans les années 1970 des guerres justes et injustes et maître d’œuvre cette année d’un ouvrage sur le retrait d’Irak intitulé Getting Out, Michael Walzer y a ainsi vu une « décision juste mais mal exécutée » : « La planification de l’évacuation aurait dû commencer dès que la décision de retrait a été prise, déplorait-il mi-août. Nous avons un devoir moral envers les personnes qui ont collaboré avec nous, mais nous en avons abandonné tellement. » Le politologue Yascha Mounk, que nous avions fait débattre avec le conservateur Patrick Deneen à quelques semaines de la présidentielle, a, lui, discerné dans les images du retrait l’échec de la promesse d’une « politique étrangère pour la classe moyenne » – en d’autres termes, celle d’un retour de l’Amérique à plus de prudence à l’international afin de se concentrer sur ses défis internes : « Conçu pour affaiblir la position de populistes comme Donald Trump, [ce retrait] ne fera que rendre leur résurgence plus probable. »

Sur la politique intérieure, notamment en matière économique et sociale, le tableau est plus positif. Dans l’esprit, le compte y est, estimait récemment Michael Sandel : auteur d’un ouvrage critique envers notre fascination pour la méritocratie, La Tyrannie du mérite (Albin Michel, 2021), le philosophe estime que Biden a le mérite de la tempérer par ses plans d’aide ciblant les Américains les plus défavorisés : « Il n’est pas prisonnier de l’orientation politique méritocratique de ses prédécesseurs, notait-il en septembre, et cela a pour partie à voir avec le fait qu’il est le premier candidat démocrate à la présidence depuis trente-six ans à ne pas être diplômé d’une université de l’Ivy League [les établissements supérieurs les plus prestigieux des États-Unis]. » Reste à savoir à quel point cette orientation pourra s’imposer, en cet automne où Biden peine à faire adopter son budget par un Congrès où il dispose d’une courte majorité ; l’essayiste Robert Reich, ancien secrétaire au Travail de Bill Clinton, reprochait récemment, non pas tant à Biden qu’à l’Amérique de Biden toute entière, de ses parlementaires récalcitrants à leurs généreux et intéressés mécènes, d’être incapable de rompre avec la « fiction de l’individualisme du ne-comptez-que-sur-vous-même ».

Interrègne et entre-deux

Ce mouvement de balancier entre un rêve de réformes et la réalité des difficultés à les faire adopter caractérise l’incertitude de cet « interrègne américain ». L’expression a été employée, dès le début de la présidence Biden, par la philosophe Nancy Fraser, qui empruntait pour l’occasion ce concept à Antonio Gramsci. Du trumpisme, cet interrègne pourrait selon elle – première hypothèse – ramener la politique américaine à ce qu’elle qualifie d’« alternative épuisée », le « néolibéralisme progressiste » des années Clinton-Obama. Sa deuxième hypothèse est celle d’un rééquilibrage durable au profit de l’aile gauche du parti démocrate, incarnée par Bernie Sanders ou Alexandria Ocasio-Cortez et dont le poids s’est accru.

Les intellectuels américains, eux aussi, se trouvent dans un entre-deux. Ils vivent la présidence Biden dans l’ombre de la présidence précédente, et dans l’inquiétude de l’empreinte qu’elle va laisser. Dans un entretien au magazine de gauche Jacobin, Noam Chomsky réserve ainsi l’essentiel de ses flèches au parti républicain, ou plutôt à un « gang de sadiques » dont il juge qu’il milite, en matière sanitaire, pour « la liberté de faire du mal » et qu’il doit être classé « parmi les partis européens d’ultradroite aux origines néofascistes ». Connu pour ses travaux sur la déconsolidation démocratique, le politiste Steven Levitsky expliquait lui récemment qu’au moment de l’écriture de son livre La Mort des démocraties, en 2018, son niveau d’inquiétude se situait à « cinq ou six » sur dix. Et aujourd’hui ? « Sept ou huit. » Là encore, ce sont les actions de Trump et ses nombreux partisans qui sont surtout visées, même s’il estime au passage que « les médias, la plupart des Américains et des membres des élites, et même le parti démocrate et l’administration Biden, ne sont pas suffisamment préoccupés » par la gravité de la crise démocratique.

Biden, une “ruse de la raison” ?

Cette ombre de Trump risque même, selon certains commentateurs, de gagner la silhouette de l’actuel président. Auteur d’une stimulante histoire du concept de populisme dans la politique américaine, Thomas Frank s’alarme que « l’hystérie » anti-Trump, sans doute nécessaire à l’élection de Biden, ne vire en complotisme chic, en un « autoritarisme progressiste », une tentation de « rejeter avec dégoût un pays qui ne satisfait pas à nos standards éclairés ». Théoricien d’une « révolte du public » à l’origine de la déstabilisation des démocraties occidentales, Martin Gurri, que nous avions interviewé début 2020, avoue, lui, son trouble face à la « trumpification » rhétorique de Joe Biden, par exemple quand ce dernier qualifie de « succès extraordinaire » le retrait américain d’Afghanistan. Pour lui, Biden est un président-Zelig dont l’image n’est pas encore bien fixée. Peut-être, suggère l’historien Michael C. Behrent, va-t-il s’avérer, par une de ces hégéliennes « ruses de la raison » qui nous gouvernent, non pas la « négation » de Trump mais sa « relève », une « nouvelle synthèse contrainte par la présidence de ce dernier », lui qui « doit naviguer dans un paysage politique façonné par son prédécesseur et les forces politiques qui l’ont porté ».

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