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Sandrine Rousseau, le 19 septembre 2021, après l’annonce du résultat de sa qualification pour le deuxième tour de la primaire écologiste au Pavillon des Canaux, à Paris. © Mathilde Mazars/Réa

Politique

Sandrine Rousseau : l’écoféminisme au deuxième tour de la primaire écologiste

Octave Larmagnac-Matheron publié le 20 septembre 2021 4 min

« Vous allez voir, je vais déjouer le match ! » : la prophétie de Sandrine Rousseau pourrait-elle se réaliser ? Si elle n’est pas arrivée en tête du premier tour de la primaire écologique (qui a rassemblé environ 120 000 votants), l’économiste accède au second tour et talonne de près (25,14 %) son principal concurrent, Yannick Jadot (27,7 %). On ne pourrait faire duel plus tranché. La radicalité revendiquée de la première tranche sur la modération du second. Rousseau se revendique « écoféministe ». Elle s’en expliquait ainsi pendant la campagne : « Notre système économique, social et sociétal est fondé sur le triptyque : nous prenons, nous utilisons et nous jetons. Le corps des femmes, le corps des plus précaires dans la société, le corps des racisés. Nous ne voulons plus de ce système-là. » 

Certaines des sorties de la candidate avaient suscité la moquerie : invitant, dans Charlie Hebdo, à renouer un « rapport sacré à la nature », elle affirmait préférer « des femmes qui jettent des sorts plutôt que des hommes qui construisent des EPR ». Irrationalisme, technophobie, culte de la nature… ces critiques sont récurrentes à l’encontre du mouvement écoféministe. Des critiques fondées ? 

Les origines

L’écoféminisme est né dans le sillage du féminisme de la deuxième vague. Le terme est employé pour la première fois par Françoise d’Eaubonne dans son livre Le Féminisme ou la Mort (1974). Elle y expose ce qui sera le principe de base du mouvement : il existe, entre l’oppression des femmes et l’exploitation à outrance de la nature, un lien historique fondamental. L’idée essaime dans différents mouvements de lutte internationaux. En Inde, des villageoises se regroupent dans le mouvement Chipko pour protester contre la déforestation : elles s’attachent à des arbres pour empêcher leur abattage. Aux États-Unis, dans le sillage de l’accident nucléaire de Three Mile Island (1979), des femmes organisent la conférence « Femmes et vie sur Terre : conférence sur l’écoféminisme dans les années 1980 » et lancent les Women’s Pentagon Actions (encerclement du Pentagone). 1980 est aussi la date de publication de La Mort de la nature (la traduction française vient de paraître aux éditions WildProject) par Carolyn Merchant, qui marque un tournant dans la conceptualisation du mouvement. Elle réhabilite en particulier la sorcière comme figure de résistance contre la double domination patriarcale et environnementale. Certaines études contemporaines accréditent ce lien : les femmes sont plus inquiètes du changement climatique, elles y sont plus vulnérables, elles s’engagent davantage dans les partis écolo, etc.

 

Les courants

  • Écoféminisme anthropologique : dès ses premiers textes sur la question, Françoise d’Eaubonne remonte au Néolithique pour essayer de comprendre comment les hommes ont, tout au long de l’histoire, essayer de dérober aux femmes le double pouvoir de la « fertilité » (contrôle de l’agriculture) et de la « fécondité » (contrôle des naissances). 
  • Écoféminisme anticapitaliste : Dans Caliban ou la Sorcière (2004), Silvia Federici souligne que la conception moderne de la nature comme pure ressource et la relégation des femmes dans la sphère domestique constituent des étapes décisives du développement du capitalisme. Elle reprend, en partie, les thèses développées par Ariel Salleh dans Ecofeminism as Politics: Nature, Marx and the Postmodern (1997, non traduit).
  • Écoféminisme décolonial : porté notamment par Maria Mies et Vandana Shiva dans Écofeminisme (1993), ce courant considère que la double domination de la nature et des femmes est lié à la domination coloniale. Shiva souligne en particulier qu’il est possible de puiser dans les sagesses non occidentales pour dépasser le dualisme culture/nature. 
  • Écoféminisme spiritualiste : c’est l’approche développée par la « sorcière » américaine Starhawk, dans Rêver l'obscur. Femmes, Magie et Politique (1982). De son point de vue, contre le « pouvoir-sur » exercé par l’homme, la femme doit renouer avec sa « puissance du dedans » pour renouer un rapport sacré au cosmos. 

 

Les critiques 

  • Imprécisions historiques : que ce soit la révolution néolithique, l’existence originelle de matriarcats ou l’importance historique des chasses aux sorcières, certains critiques soulignent les erreurs factuelles et les exagérations interprétatives de l’écoféminisme. Même si l’on accepte le lien historique entre exploitation de la nature et domination patriarcale, dans quelle mesure ce lien a-t-il encore un sens aujourd’hui ? 
  • Technophobie : bon nombre d’écoféministes rejettent en bloc la technique, vue comme le bras armé de la modernité patriarcale. Naïf, idéalistes, répliquent certains, dans un monde où il faut assurer la vie de 7 milliards d’êtres humains. Certaines, comme Donna Haraway (notamment dans Manifeste cyborg, en 1984) défendent au contraire la technique comme source de réinvention de l’humain et de contestation des dualismes.
  • Irrationalisme : promouvant un rapport intuitif et spirituel censé être plus respectueux des mystères de la nature, une partie des écoféministes rejettent la raison qui « analyse », c’est-à-dire décompose, le réel, comme une arme patriarcale, source de l’opposition entre culture et nature. Une impasse, pour certaines penseuses du mouvement, comme Janet Biehl (Finding our way: Rethinking Ecofeminist Politics, 1991 ; non traduit). 
  • Essentialisme : l’écofémisme est fréquemment accusé d’essentialiser l’identité féminine (à travers le culte de la puissance maternelle, notamment) et de l’emprisonner dans la nature, là où le féminisme devrait être un vecteur d’émancipation de la tyrannie naturelle. C’est notamment la critique d’Élisabeth Badinter : selon cette critique, l’idée qu’il y aurait un lien privilégié entre femme et nature est justement le fondement de la logique patriarcale.
Pour en savoir plus sur Françoise d’Eaubonne, pionnière de l’écoféminisme
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