Aller au contenu principal
Menu du compte de l'utilisateur
    S’abonner Boutique Newsletters Se connecter
Navigation principale
  • Le fil
  • Archives
  • En kiosque
  • Dossiers
  • Philosophes
  • Lexique
  • Citations
  • EXPRESSO
  • Agenda
  • Masterclass
  • Bac philo
 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
rechercher
Rechercher

Détail de l’illustration de couverture de “La Puissance des femmes”. © Philo Éditions

Une semaine avec les femmes philosophes

Judith Shklar, le libéralisme de la peur

Octave Larmagnac-Matheron publié le 18 novembre 2020 4 min

Effacées, oubliées, dédaignées, les femmes ont traversé l’histoire de la philosophie en clandestines. Que reste-t-il de leur pensée ? Des traces, des bribes, des témoignages indirects, voilà pour l’Antiquité. « La parole est l’affaire des hommes », dit Homère ! « Cause toujours », ont répondu les femmes, siècle après siècle contre vents et marées, bûchers et interdits, condescendance et domination. Et d’Hypatie d’Alexandrie à Olympe de Gouges, de Rosa Luxemburg à Simone Weil et Hannah Arendt, elles ont osé penser aussi bien les questions universelles que leur propre condition, jusqu’à l’émergence des nouveaux féminismes contemporains.

C’est pour rendre hommage aux combats de ces femmes philosophes que Philosophie magazine Éditeur publie La Puissance des femmes. Une autre histoire de la philosophie (disponible depuis le 12 novembre). Une galerie, une anthologie, une fresque qui raconte autrement la grande histoire de la pensée. Chaque jour de cette semaine, nous publions un portrait extrait de cet ouvrage. Aujourd’hui : Judith Shklar, la « Hannah Arendt lettone », qui fut l’une des penseuses politiques les plus influentes du XXe siècle outre-Atlantique et théorisa le « libéralisme de la peur ».

 

© Philo Éditions

Commander La Puissance des femmes sur notre boutique.

 

  • Considérée comme la « Hannah Arendt lettonne » en raison de ses réflexions politiques novatrices, Judith Shklar, surnommée « Dita », naît le 24 septembre 1928 à Riga. Issue d’une famille juive non pratiquante, son père est entrepreneur et sa mère pédiatre. Lorsque l’URSS attaque la Pologne, au début de la Seconde Guerre mondiale, la menace d’une occupation de la Lettonie par le régime soviétique devient particulièrement claire. La famille fait alors le choix d’émigrer, d’abord vers la Suède, puis vers les États-Unis, et enfin au Canada. Dita commence alors ses études à l’université McGill, où elle obtient une maîtrise, avant d’intégrer les rangs d’Harvard.
  • En 1955, elle soutient brillamment sa thèse de doctorat en science politique sous la direction du politologue Carl Joachim Friedrich, célèbre pour sa réflexion sur le totalitarisme. Selon les dires de la jeune femme, Friedrich ne lui aurait fait qu’un seul compliment : « Eh bien, ce n’est pas la thèse habituelle, mais je ne m’attendais pas à cela… »  Shklar succède bientôt à son maître et commence une longue carrière d’enseignante au sein de Harvard. Reconnue par ses pairs, elle préside un temps l’American Society for Political and Legal Philosophy et l’American Political Science Association. 
  • Elle exerça une influence durable sur toute une génération de chercheurs en science politique : Amy Gutmann, Patrick T. Riley, Nancy L. Rosenblum… Son collègue et ami Stanley Hoffmann disait d’elle qu’elle « était la plus grande star du département », « la personne la plus terriblement intelligente » qu’il ait rencontrée. L’œuvre de Shklar est, pour l’essentiel, influencée par les réflexions politiques de Rousseau, de Montaigne et de Montesquieu. À travers ses ouvrages, elle développe une conception novatrice du libéralisme : le « libéralisme de la peur ». 
  • À partir d’une réflexion sur la cruauté qu’elle élabore dans Ordinary Vices (1984), la philosophe insiste sur les « inévitables inégalités de pouvoir » qui résultent de l’organisation politique – et conduisent, irrémédiablement, à exposer les citoyens à la cruauté d’un État abusant de ses prérogatives. Les philosophes n’ont fait que penser la justice et la vertu afin de réformer l’État. En réalité, pour elle, le pouvoir est par nature cruel : il est donc temps de s’efforcer de prendre au sérieux l’injustice et le vice. C’est la seule manière pour donner voix aux victimes de l’histoire, aux individus que menace sans cesse la violence. 
  • Judith Shklar est en cela proche de l’idée développée par Jan Patočka d’une « communauté des ébranlés ». À ses yeux, la question politique essentielle n’est pas de définir un idéal politique positif, un projet utopique qui risque toujours de verser dans le totalitarisme, mais de protéger les individus des abus du pouvoir. C’est pourquoi, elle défend le principe d’une démocratie constitutionnelle qui, si elle n’a rien d’un régime politique idéal, garantit au moins – par la négative – aux citoyens des moyens de défense contre le gouvernement, par l’entremise d’une « multiplicité de groupes politiques actifs ». 
  • Le libéralisme politique doit, à ses yeux, se concevoir non comme la reconnaissance de droits subjectifs positif, mais comme la préservation, pour chaque individu, d’un espace de liberté négative (liberté de ne pas être contraint) le plus large possible. Et de conclure sur le nouveau libéralisme qu’elle propose : « Tout adulte devrait être en mesure de prendre sans crainte et sans préjugé autant de décisions sur autant d’aspects de sa vie que cela est compatible avec la même liberté pour tout autre adulte. Cette conviction correspond à la signification originale du libéralisme, la seule qui se justifie. […] La peur systématique rend la liberté impossible, et rien n’est plus terrifiant que l’attente d’une cruauté institutionnalisée. […] Le libéralisme doit pouvoir faire des maux de la cruauté et de la crainte la référence fondamentale de ses pratiques et règles politiques. »

 

La Puissance des femmes. Une autre histoire de la philosophie, dirigé par Octave Larmagnac-Matheron et Sven Ortoli, est disponible sur notre boutique en ligne.

Réfugiés, migrants, exilés : l’humanisme de Judith Shklar, dans le texte
Expresso : les parcours interactifs
La dissertation
Une dissertation n’est ni un journal intime, ni une restitution de cours. Pour éviter le hors-sujet, il faut savoir approcher l’énoncé et formuler une bonne problématique. 
Découvrir Tous les Expresso
Sur le même sujet
Article
3 min
Judith Shklar, “Obligation, loyauté, exil”
Judith Shklar 18 novembre 2020

Fidèle à sa défense des victimes de l’histoire et de la cruauté politique, Judith Shklar a, à de nombreuses reprises, alerté sur la souffrance des…

Judith Shklar, “Obligation, loyauté, exil”

Article
4 min
[Exclusif] Hannah Arendt : “Avoir l’esprit politique, c’est se soucier davantage du monde que de nous-mêmes”
Hannah Arendt 07 octobre 2021

À l’occasion de la publication du Cahier de l’Herne consacré à Hannah Arendt et dirigé par Martine Leibovici et Aurore Mréjen, nous publions avec…

[Exclusif] Hannah Arendt : “Avoir l’esprit politique, c’est se soucier davantage du monde que de nous-mêmes”

Article
3 min
[Exclusif] Hannah Arendt : “La cybernétique et la révolution du travail”
Hannah Arendt 05 octobre 2021

À l’occasion de la publication du Cahier de l’Herne consacré à Hannah Arendt et dirigé par Martine Leibovici et Aurore Mréjen, nous publions avec…

[Exclusif] Hannah Arendt : “La cybernétique et la révolution du travail”

Article
5 min
Michel Terestchenko : “Hannah Arendt ouvre un espace politique dans lequel seule la liberté humaine peut se réaliser”
Victorine de Oliveira 27 novembre 2023

Spécialiste de philosophie morale et politique, Michel Terestechenko explique ici, en préface aux extraits de « Le travail, l’œuvre, l’action…

Michel Terestchenko : “Hannah Arendt ouvre un espace politique dans lequel seule la liberté humaine peut se réaliser”

Article
16 min
Leibovici et Mréjen : “Ne plus se sentir responsable de ce que l’on fait, voilà le ressort de la banalité du mal pour Arendt”
Martin Legros 06 octobre 2021

Dans le passionnant Cahier de l’Herne qu’elles ont dirigé, Martine Leibovici et Aurore Mréjen ont rassemblé un très grand nombre de textes et d…

Leibovici et Mréjen : “Ne plus se sentir responsable de ce que l’on fait, voilà le ressort de la banalité du mal pour Arendt”

Article
3 min
[Exclusif] Hannah Arendt : “Le délitement de l’autorité”
Hannah Arendt 04 octobre 2021

À l’occasion de la publication du Cahier de l’Herne consacré à Hannah Arendt et dirigé par Martine Leibovici et Aurore Mréjen, nous publions avec…

[Exclusif] Hannah Arendt : “Le délitement de l’autorité”

Article
15 min
Les réfugiés, le maire frontiste et le bistrot du coin
Michel Eltchaninoff 28 novembre 2018

Depuis près d’un an, une trentaine de demandeurs d’asile sont accueillis dans le bourg varois du Luc en Provence. Après une vive polémique lancée…

Les réfugiés, le maire frontiste et le bistrot du coin

Article
7 min
Hannah Arendt : et l’homme se métamorphosa en extra-terrestre…
Michel Eltchaninoff 12 avril 2021

Avec la révolution copernicienne, l’homme entame un parcours qui le mènera jusqu’à la conquête de l’espace. Mais gagne-t-on à regarder l’humanité…

Hannah Arendt : et l’homme se métamorphosa en extra-terrestre…

À Lire aussi
Fermer les prisons pour mieux les rouvrir
Fermer les prisons pour mieux les rouvrir
Par Cédric Enjalbert
mars 2017
Élisabeth Badinter : "Les femmes sont en train de se doter d’une double puissance"
Par Martin Legros
Hannah Arendt. La passion de comprendre
Hannah Arendt. La passion de comprendre
janvier 2016
  1. Accueil-Le Fil
  2. Articles
  3. Judith Shklar, le libéralisme de la peur
Philosophie magazine n°178 - mars 2024
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Avril 2024 Philosophe magazine 178
Lire en ligne
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Réseaux sociaux
  • Facebook
  • Instagram
  • Instagram bac philo
  • Linkedin
  • Twitter
Liens utiles
  • À propos
  • Contact
  • Éditions
  • Publicité
  • L’agenda
  • Crédits
  • CGU/CGV
  • Mentions légales
  • Confidentialité
  • Questions fréquentes, FAQ
À lire
Bernard Friot : “Devoir attendre 60 ans pour être libre, c’est dramatique”
Fonds marins : un monde océanique menacé par les logiques terrestres ?
“L’enfer, c’est les autres” : la citation de Sartre commentée
Magazine
  • Tous les articles
  • Articles du fil
  • Bac philo
  • Entretiens
  • Dialogues
  • Contributeurs
  • Livres
  • 10 livres pour...
  • Journalistes
  • Votre avis nous intéresse